Double jeu [pv Ethan :3]

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angdon, dernièrement, passait très clairement plus de temps dans l'église qui abritait les fidèles de Salem (si on lui avait dit qu'il passerait autant de temps dans une église, lui qui avait cessé de croire en Dieu à la mort de sa mère, après que ses prières pour la guérir de sa maladie n'aient pas porté leurs fruits) qu'au sein de son propre foyer. En même temps, le concernant, la notion de "foyer était toute relative. L'appartement de Langdon était si jonché de vieux papiers et de vêtements sales qu'il devenait de plus en plus inhabitable, quant au foyer familial... à présent qu'il n'y avait plus que lui et son père, qui refusait obstinément d'entendre les arguments qu'il avait à avancer au sujet de la mort de son frère. Il n'y avait qu'auprès des fidèles de Salem qu'il ne se sentait pas jugé, que ses pensées semblaient être entendues, qu'il avait l'impression d'avoir de la valeur, de compter, et d'être capable d'aller de l'avant. S'il n'avait pas Mary Lou et son association, il état convaincu qu'il sombrerait, purement et simplement. Alors qu'importe si tout le monde trouvait cela profondément malsain ou absurde, lui essayait de trouver un semblant d'équilibre, et il n'avait vraiment plus envie de quitter ces murs, encore moins d'abandonner cette cause. Le moindre prétexte qui se présentait à lui pour aider les fidèles de Salem, il le saisissait, et une chance pour lui, Mary Lou n'oubliait jamais d'exploiter ce filon, ravie de l'influence qu'elle avait sur lu, même si les contacts qu'il avait dans la presse ne suffisaient malheureusement pas à disperser plus largement leurs idéaux.

Mary Lou était partie faire quelques courses, ne restaient que ses enfants adoptifs, dans leurs chambres, que Langdon était supposé "surveiller" en son absence. Pour Modesty, il pouvait comprendre, mais il lui semblait évident que ses aînés étaient en âge de veiller sur elle (encore que concernant Credence, il n'était même pas certain que ce dernier soit réellement capable de veiller ne serait-ce que sur lui-même). Mais il n'avait pas cherché à protester. Les Barebone vaquaient à leurs occupations et se faisaient oublier, et lui, il avait un bon prétexte pour demeurer dans cet endroit qui était à peu près le seul où il avait le sentiment d'être à sa place. Il était en train de relire et de corriger, à la demande de Mary Lou, différents tracts que la femme avait rédigés le matin même. Il était affairé à la tâche quand il entendit la porte s'ouvrir, trop tôt pour qu'il s'agisse de Mary Lou. Il releva la tête et se détendit légèrement en découvrant l'identité de l'intrus, qui lui-même était un habitué des fidèles de Salem. Il était rassuré. L'église avait été saccagée dernièrement, et il était soulagé d'apprendre que ce n'était pas un nouveau vandale qui faisait irruption.

-Bonsoir, Ethan.

Il était étonné de le voir arriver si tard, mais il supposait qu'il avait de bonnes raisons d'être là. Il était curieux d'entendre lesquelles.

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ans grande cérémonie, Ethan emanda à son interlocuteur si Mary Lou était là, ce qui ne pouvait qu'être une question d'usage, car si l'homme espérait encore trouver Mary Lou, il n'aurait pas posé la question de façon si rhétorique. Malgré tout, l'étuiant en journalisme prit la peine de répondre, hochant la tête de gauche à droite en signe de négation. En effet, Mary Lou n'était pas là, et le fait qu'Ethan demande à la voir (même si ce n'était pas surprenant, elle était le chef de file des fidèles de Salem, que tout le monde choisisse de se référer à elle tenait de la pure logique en conséquence, et mieux valait qu'il en soit ainsi et que cette sorte de hierarchie soit totalement respectée, il n'y avait que de cette façon qu'ils pourraient espérer progresser - ou du moins Langdon l''entendait-il de cette oreille).

-Elle est sortie, apprit-il donc à son interlocuteur, elle devrait être de retour dans moins d'une heure, ajouta-t-elle afin de faire comprendre à son interlocuteur que s'il lui prenait l'envie de l'attendre, il en avait tout à fait la possibilité, et Langdon ne serait pas contre si cela pouvait lui permettre d'assouvi sa curiosité et de connaître les motifs de la venue du jeune homme... même s'il n'allait peut-être pas les lui communiquer pour autant en réalité, il ne fallait pas se leurrer non plus. Du nouveau ? osa-t-il tout de même demander afin de ne pas perdre plus de temps et satisfaire directement à sa curiosité.

Cette question pouvait bien vouloir tout et rien dire, en fin de compte, et Langon le savait parfaitement. Il y gagnerait peut-être à se montre plus explicite, mais il ne le faisait pas malgré tout, parce que cette question qui n'était faite que eux mots suffirait à son interlocuteur pour lui répondre le plus précisément possible. Il serait ravi d'entendre de nouvelles informations dont il n'aurait pas eu connaissance jusqu'alors : n'importe quoi qui lui donnerait le sentiment que la cause des fidèles de Salem allait en s'améliorant, qu'ils rencontraient ne serait-ce qu'un début de commencement de progrès, quelque chose qui lui permettrait de progresser dans le deuil de son frère. Car il fallait bien l'avouer, l'affaire était à ses yeux toute personnelle. Il n'avait pas forcément souhaité qu'il en soit ainsi, mais c'était malgré tout le cas, force lui était de le reconnaitre, et par conséquent, il se rendait attentif au moindre sursaut, au moindre progrès, à tout ce qui pourrait lui donner le sentiment d'avancer sur la bonne voie.

-Vous voulez l'attendre ? Ou vous souhaitez que je lui transmette un message ? se permit-il tout de même de pondérer pour ne pas avoir l'air non plus de se montrer trop insistant dans l'affaire. Ce qui valait très certainement mieux.

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Langdon ne put s’empêcher d’afficher sa déception quand son interlocuteur lui apprit qu’il n’y avait rien de nouveau. Ce n’était pas vraiment une surprise, il savait qu’il y avait peu de chances pour qu’un grand rebondissement change du jour au lendemain le cours des choses, il savait pertinemment que la lutte des fidèles de Salem contre les sorciers allait nécessiter du temps et de la patience, et que la moindre évolution se ferait progressivement, par petites touches, et pas d’un coup d’un seul… mais c’était plus fort que lui malgré tout. La présence de son interlocuteur lui prêter à espérer qu’il ait voulu informer Mary Lou d’une information ou l’autre, quelle qu’elle soit. Mais non, ce n’était pas le cas, et il allait donc devoir se satisfaire de l’insatisfaisante routine. Même au sein d’une organisation comme les fidèles de Salem, qui cherchait à lutter contre un ennemi bien défini et défendait une cause très stricte, il fallait accepter que s’instaure une sorte de routine. Rome ne s’était pas faite en un jour, il paraît… Ils allaient devoir se satisfaire de cela… Peut-être, qui sait, que le fait de parler ensemble allait apporter un éclairage nouveau sur leur situation, tentait de se consoler Langdon, c’était comme cela que fonctionnaient les brainstormings, et ils étaient souvent appréciés dans le milieu du journalisme, ou la quête de réponse était plus que nécessaire. Ils verraient bien. Quoi qu’il en soit, Ethan avait bel et bien l’intention d’attendre Mary Lou, donc ils auraient bien tout le loisir de le constater… ou pas. Dans un premier temps, un silence un peu pesant s’installa entre eux, puis finalement, le jeune homme, loup déguisé en agneau, reprit la parole.

Comment est-ce qu’il allait. Il n’était pas rare qu’on lui pose la question, et Langdon n’avait pas de réponse toute faite à cette question… ou du moins si, il en avait une : il ne répondait pas. Il n’allait pas bien… Sa vie n’avait jamais été idéale avant même la mort de son frère mais c’était un fait que cette dernière l’avait plongé dans des abysses si profonds qu’il n’était pas certain de savoir s’en extirper… Et il ne cherchait pas réellement à s’en extirper, en réalité. Non, il s’enfonçait toujours un peu plus profondément dans ses névroses, et c’était comme s’il ne savait plus vivre sans elles. Il n’allait pas bien, plus le temps passait, plus il s’enfonçait dans l’obsession et la noirceur, plus il se laissait aveugler par une haine que les propos de Mary Lou attisaient mieux que quoi que ce soit d’autre. Il n’allait pas bien, non.

-J’irai mieux quand nous aurons progressé, répondit-il alors pour ne pas s’appesantir son sort mais ne pas mentir non plus. Pas que mentir à son interlocuteur lui poserait réellement le moindre cas de conscience, mais dans tous les cas, il n’avait aucune raison de le faire auprès des quelques alliés qu’il lui restait, bien au contraire. Je ne sais pas quoi faire pour faire avancer les choses.

Et c’était frustrant. Après tout, il ne pouvait pas reprocher aux autres de ne pas avancer s’il n’en était pas plus capable de son côté.

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ifficile d'avancer, c'était en effet une excellente façon de présenter les choses. Le jeune homme n'avait pas envie de se montrer défaitiste, il était hors de question pour lui d'avoir fait tout ça pour rien, sans quoi son frère serait définitivement mort pour rien, mais il est vrai que s'entendre confirmer que pour l'heure, la situation n'évoluait pas, était assez difficile. Enfin, au moins ne pouvait-il pas reprocher à son interlocuteur son absence de sincérité, et il avait bien besoin de cela, dans ces circonstances, d'honnêteté et d'individus capables de comprendre le combat qu'il menait. En ce sens, il ne pouvait définitivement être mieux qu'entre ces murs.

Le jeune homme ajouta qu'ils manquaient avant tout d'aide financière, et que c'était du moins l'opinion de Mary Lou. Langdon était entièrement d'accord avec cela, et il l'avait été dès le début. Il n'avait jamais rien désiré d'autre que de voir la ligue des fidèles de Salem gagner en influence dès lors qu'il avait eu connaissance de cette association et avait décidé de s'y impliquer. Malheureusement, ce n'était pas parce qu'il avait conscience de ce qu'il devrait faire que c'était simple pour autant, car on se heurtait au scepticisme et aux moqueries d'autrui comme à un mur. Langdon en savait quelque chose au vu de la réaction de sa propre famille. Et à ce sujet, d'ailleurs, son interlocuteur n'oublia pas d'évoquer son père, et Langdon se sentit envahi d'une vague d'agacement... pas orientée contre Ethan mais bien davantage contre son père...

-J'ai déjà essayé, soupira-t-il.

Il n'aimait pas l'idée que l'on puisse s'imaginer qu'il n'avait pas fait tout son possible pour obtenir le soutien de Henry Shaw Sr. Il avait essayé avant même la mort de son frère. Et oui, il avait tenté de réitérer l'effort, depuis, mais il avait dû se faire une raison : ça ne menait absolument nulle part... et au lieu d'être sensible à ses arguments, il s'était renfermé sur lui-même depuis la mort de Henry... peut-être que ça changerait... mais ce n'était absolument pas gagné, loin de là...

-Et j'essaie toujours, mais ce n'est pas si simple...

Pour des centaines de raisons, cette situation était loin, vraiment loin d'être simple. Il avait envie d'y changer quelque chose, il avait envie de réussir à changer les choses, profiter de son statut, de son lien avec son père pour en faire quelque chose, mais il ne suffisait pas toujours de vouloir pour pouvoir... Il voulait penser que la situation se décanterait, mais en attendant, il estimait qu'on devrait cesser de vouloir compter après l'aval de son père et chercher d'autres solutions. Henry Shaw n'était pas le seul sorcier influent de New York, après tout.

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ui, il allait bien falloir qu'ils se débrouillent autrement, en effet, ils n'allaient pas avoir réellement le choix. Il ne servait à rien de quémander encore et encore que Henry Shaw leur prête une oreille attentive, s'ils voulaient vraiment des résultats, il fallait qu'ils acceptent de déployer leurs efforts ailleurs, auprès d'autres personnes influentes. Et ce n'était pas ce qui manquait, à New York. Quelques grandes pontes, un peu plus excentriques, daigneraient peut-être leur adresser un intérêt un tant soit peu plus vif, c'était à considérer. Ce qui ne voulait pas dire que, pour sa part, il ne comptait pas revenir vers son père pour essayer une nouvelle fois de le rallier à leur cause.

C'était au-delà de ce qu'il accepterait d'entendre ou non, c'était au-delà de l'appui financier qu'il pourrait apporter aux fidèles de Salem. C'était de son père, de la mort de son frère, qu'il s'agissait, c'était important pour lui que d'être cru, qu'on cesse de le prendre pour un illuminé. Il avait envie de regagner l'affection d'un père, affection qui lui avait été dérobée il y a beaucoup trop longtemps. Mais rien ne se passait comme il le désirait. Rien n'évoluait dans le sens qu'il avait recherché... Et plus le temps passait, plus il était douloureux pour lui de faire comme s'il était capable de gérer cette situation avec la distance nécessaire. Qui le prendrait véritablement au sérieux, d'ailleurs ? Il était assez évident qu'il était devenu... fragile, obsessionnel... et tout ça ne jouait pas spécialement en sa faveur.

En tout cas, sans avancer que les mots employés par Ethan avaient été choisis dans l'espoir de le blesser le plus sûrement possible, ils y réussissaient sans problème. Rien que "on ne peut pas compter sur votre père", c'étaient là des propos foncièrement désagréables. Réalistes sans doute, mais justement, d'autant plus douloureux qu'ils étaient en effet véridiques. Et préciser le fait que tout ça le touchait personnellement, comme si ce n'était pas la plus pure évidence, c'était vraiment... épouvantable à ses yeux.

-Raison de plus pour porter son choix sur quelqu'un d'autre. Je doute que l'on puisse se fier à quelqu'un qui se montre à ce point aveugle aux circonstances du meurtre de son propre fils, observa-t-il non sans amertume.

Et clairement, il manquait de distance par rapport à ce sujet, ainsi que de toute l'objectivité dont il devrait avoir besoin pour traiter toutes ces affaires. D'un autre côté, c'était aussi cette absence totale d'objectivité qui faisait qu'il se montrait à ce point investi, donc on ne pouvait pas dire que ce soit une mauvaise chose en soi, loin de là. Dans tous les cas, il ne risquait pas de s'opposer à cette décision, il n'avait aucune raison de le faire. tout ce qui comptait pour lui, c'était que les fidèles de Salem obtiennent gain de cause.

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indélicatesse d'Ethan commençait à devenir, aux yeux de Langdon, assez agaçante. Oh, il pouvait comprendre, en se montrant objectif, que l'on n'éprouve aucune réelle tristesse concernant la mort de son sénateur de frère tant ce dernier pouvait être... lui, et il ne demandait pas non plus à ce que tout le monde s'apitoie sur son sort. Il n'avait pas envie d'être une victime (même s'il estimait l'être, circonstances à l'appui), il avait envie d'en faire... mais cela n'ôtait rien au fait qu'il apprécierait que l'on fasse preuve à son adresse d'un minimum de tact quand il évoquait le décès de ce dernier... Enfin, ce n'était pas le débat, et Langdon n'avait pas vraiment l'énergie de débattre à ce sujet à l'heure actuelle. Il ne pensait pas, d'ailleurs, que ça saurait les mener où que ce soit dans tous les cas.

L'essentiel était dit. Même si Henry Shaw avait semblé être la cible idéale dans cette situation, il ne l'était pas, et plutôt que de s'acharner à essayer de le convaincre, Langdon préférait largement que l'on se concentre sur quelque chose d'autre, sur quelqu'un d'autre. Ethan avait l'air d'accord sur ce point, et par conséquent, Langdon préférait se concentrer là-dessus plutôt que de penser à autre chose... même s'il y pensait tout le temps, dans le fond. Il n'y pouvait malheureusement rien, c'était juste plus fort que lui. Et ça avait de bonnes chances de durer encore longtemps de cette manière, il le savait bien, du moins jusqu'à ce que justice soit faite, jusqu'à ce que l'ordre soit rétabli, jusqu'à ce que les sorciers ne soient plus une menace pour qui que ce soit. Autant dire une éternité.

-Il le faudra bien, répondit Langdon d'un ton ferme.

Ils n'avaient pas besoin de son père, ils n'avaient pas besoin de l'empire Shaw, ni son père ni son frère n'avaient jamais été indispensables, en dépit de tout ce qu'ils avaient toujours pu se plaire à affirmer, et les circonstances ne cesseraient jamais de le confirmer par ailleurs. Alors oui, il le faudrait bien. Et New York regorgeait de milliardaires excentriques qui n'auraient sans doute rien de mieux à faire de leur argent de toute manière.

-Je ne dois pas être le seul à avoir dans mon entourage des personnes riches et influentes, non ? ajouta-t-il simplement.

C'était quand même un comble que même ici, il demeure le fils de son père alors que c'était justement son rapprochement avec les fidèles de Salem qui l'avait éloigné de son géniteur (même s'ils n'étaient déjà pas réellement proches avant cela, il faut bien le reconnaître. Alors oui, il avait envie qu'on lui lâche un peu la grappe et qu'on aille voir ailleurs. Ethan ne semblait appartenir à une classe sociale relativement aisée. Pourquoi ne s'intéresserait-on pas à son entourage à lui ?

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e moins que l'on puisse dire, c'est qu'Ethan ne prenait pas de gants avec lui. Peut-être qu'il l'avait cherché, parce qu'on ne pouvait pas vraiment affirmer qu'il avait fait preuve de délicatesse l'instant d'avant, mais il ne comptait pas s'en excuser. C'était comme ça. Langdon était à fleur de peau, constamment, depuis la mort de son frère. Il n'y avait même pas besoin de le piquer pour qu'il réagisse, il avait tendance à se montrer excessivement susceptible quoi qu'on lui dise dans tous les cas. D'ailleurs, peut-être qu'Ethan avait été maladroit dans ses propos ou n'avait pas cherché à l'attaquer directement, mais Langdon se sentait agressé malgré tout.

Il avait fait ce qu'il avait pu. Il détestait qu'on le traite avec tant de condescendance. C'était typiquement le genre de comporteents que Henry avait eu tendance à adopter avec lui et il détestait cela. C'est vrai, dans le fond, il avait fait ce qu'il avait pu concernant son père, et il n'avait pas envie d'insister davantage, pour autant, il avait quand même l'impression que les propos de son interlocuteur sous-entendaient autre chose. A savoir que oui, il avait fait ce qu'il avait pu, et ne servait donc plus à rien à présent.

Sauf qu'il n'était pas de cet avis. Il n'avait pas l'intention de se reprocher à lui le caractère trop borné de son père, et il n'avait pas l'intention de se considérer comme inutile sous prétexte qu'il ne pouvait apporter aucun soutien financier aux Barebone (en dehors de ses biens personnels, mais ce n'était pas assez... et ce serait encore moins suffisant si son milliardaire de père devait décider de lui couper les vivres). C'est vrai qu'il se sentait souvent frustré de ne pas réussir à en faire assez, de ne pas être entendu...

-Et vous, que faites-vous exactement ? se contenta-t-il de répliquer d'un ton froid.

Il n'avait plus l'envie ni la patience d'être cordial à l'heure actuelle, et ce n'était certainement pas le genre d'efforts qu'il avait l'intention de faire. Mais c'était vrai. C'était bien beau de lui rétorquer ce genre de choses, mais en dehors de le voir parader au sein de l'église, Langdon ne saurait dire ce qu'Ethan avait apporté de significatif aux fidèles de Salem depuis qu'il avait intégré le groupe. En soi, il ne lui serait jamais venu l'intention de le lui reprocher, car ils estimaient qu'ils étaient sur un pied d'égalité : ils cherchaient à éveiller l'esprit du plus grand nombre de personnes, ils parlaient, ils aidaient à la distribution de tracts, ils cherchaient du soutien auprès de personnes influentes et une couverture médiatique... ils agissaient précisément de la même façon. Fallait-il considérer qu'Ethan "avait fait ce qu'il avait pu" ?

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angdon ne se retint pas d’afficher une grimace peu convaincue quand son interlocuteur faisait ce qu’il fallait. En soi, le jeune homme n’avait pas envie d’avoir quoi que ce soit contre son interlocuteur. Les alliés à la cause étaient déjà peu nombreux, il n’était pas question qu’ils commencent à se mettre des bâtons dans les roues, mais à être considéré avec mépris, comme s’il n’était qu’un moins que rien, forcément, il finissait par vouloir rendre la pareille à son interlocuteur. En l’occurrence, il trouvait plutôt simple d’affirmer qu’il faisait ce qu’il fallait. Lui aussi pouvait se contenter de dire cela, mais il se permettait d’être franc et précis, et oui, c’est vrai que jusqu’ici, il n’était pas parvenu à grand-chose de fructueux. Cela n’ôtait rien au fait qu’il ne ménageait aucun effort. Depuis la mort de Henry, Langdon ne vivait plus que pour faire entendre la cause des fidèles de Salem, quiconque le connaissait un tant soit peu pouvait en attester et ne saurait contester ce fait indéniable, alors il n’aimait pas que l’on puisse remettre en question son potentiel, de quelque manière que ce soit.

Il ajouta qu’il était sur le point de trouver une grande source de financement. Sur le point de, ça voulait dire que ce n’était pas encore le cas, pas vrai ? Langdon, par simple esprit de revanche, aurait envie que son interlocuteur mente, mais dans le fond, il espérait tout de même que tout ceci était vrai, car si c’était bel et bien le cas, cela signifierait que les fidèles de Salem auraient de nouvelles chances, plus certaines, plus importantes, d’obtenir gain de cause, et c’était le genre de chances à côté desquelles le jeune homme ne pouvait pas vouloir passer. Il y avait des priorités dans la vie, et faire savoir définitivement au monde que les sorciers existaient et qu’ils représentaient un véritable danger, cela avait cent fois plus d’importance que ce qui concernait son petit ego fragile. Et voilà qu’Ethan en rajoutait encore en prétendant qu’ils allaient progresser. Ce qu’il entendait à travers ces mots, c’est que son interlocuteur prenait les choses en mains, lui… Oui, bon, en attendant, Langdon attendait encore de voir un résultat quelconque de sa part, car aux dernières nouvelles, ils étaient aussi efficaces l’un que l’autre, sans vraiment de distinction.

-Je ne m’en suis jamais inquiété, se rembrunit Langdon qui n’avait aucune intention de se laisser traiter avec tant de condescendance plus longtemps. Langdon avait toujours été quelqu’un de très susceptible, et ça ne s’était clairement pas arrangé avec le temps. Au contraire, ça avait plutôt eu tendance à empirer. Surtout si vous êtes sur le point de nous apporter une source de financement si prodigieuse que vous n’êtes même pas en mesure de donner plus de détails à ce sujet.

Si l’on doutait encore du fait que Langdon se sentait piqué à vif par les réflexions de son interlocuteur, voilà qui mettait définitivement les choses au clair. Oui, il était définitivement agacé… Comme s’il avait besoin d’une conversation si déplaisante en plus du reste.

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lus Langdon passait de temps avec son interlocuteur - toujours à contrecoeur, cela va sans dire - moins le jeune homme comprenait ce qui motivait Mary Lou Barebone à lui accorder son temps et sa confiance, si ce n'est le fait qu'il présentait bien. C'est sûr, étant donné le nombre relativement faible de leurs adeptes, ils ne pouvaient pas forcément se permettre de faire la fine bouche, mais tout de même... Quand il entendait son interlocuteur affirmer qu'il fallait savoir faire la fine bouche, il était absolument convaincu qu'ils ne jouaient pas dans la même catégorie, et qu'Ethan Bryce n'appréhendait pas sa situation avec le sérieux nécessaire.

Ménager le suspense, qu'est-ce qu'il ne fallait pas entendre ! Ce n'était pas un jeu, un roman ou un film, c'était la vie réelle, et des vies humaines étaient en jeu, certaines avaient déjà été fauchées en plein vol... celle de son frère. Et lui, il parlait de ménager le suspense ! Langdon en pleurerait presque de rage tant la légèreté qu'affichait son interlocuteur lui était positivement insupportable. Mais il ne ferait pas ce plaisir à son interlocuteur. D'autant plus qu'il avait l'intuition que c'état très exactement ce que l'homme recherchait : le voir se mettre dans une colère noire ou l'accabler de reproche pour, lui, pouvoir le toiser du haut de toute sa suffisance. Evidemment, il ne lui ferait pas ce plaisir. Sans façon.

-S'il est vraiment susceptible de nous apporter un financement conséquent, je dois connaître au moins l'entreprise qu'il possède ou le patrimoine dont il a hérité. J'ai côtoyé les familles les plus fortunées de New York. Ce Sangster ne me dit rien, mais je ne demande qu'à en apprendre plus, sur lui et l'origine de sa fortune. Tout pas en avant ne saura que nous être profitable.

Le jeune homme n'avait pas l'intention de se contenter d'un unique nom et de hocher la tête comme si de rien n'était. Non, il n'avait jamais entendu parler de ce Sangster. Bien sûr, ça ne voulait pas dire qu'il n'existait pas (même si Langdon n'était toujours pas complètement convaincu), mais un simple nom ne serait jamais suffisant pour le convaincre. Il ne mentait pas, pour sa part, il avait en effet côtoyé une bonne partie du gratin new-yorkais. Pas qu'il ait beaucoup de relations de son côté, mais entre son père grand patron de presse et son frère sénateur, il en avait vu défiler, des gros bonnets... on pourrait admettre là qu'il était d'autant plus inutile puisqu'en dépit de ces fréquentations, il n'avait pas trouvé de financement aux fidèles de Salem, mais au moins, il restait intègre à lui-même et fidèle à ses convictions, ces convictions mêmes qui justifiaient que les gros bonnets susnommés ne lui fassent pas confiance à l'heure actuelle. Si Bryce avait trouvé une poule aux oeufs d'or, grand bien leur fasse, et tant mieux pour leur cause, mais fanfaronner était une chose, préciser les faits en était une autre.

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angdon poussa un soupir. Son interlocuteur voulait l'impressionner en prétendant appartenir à la haute et fréquenter du grand monde, c'était son problème également, dans tous les cas, le jeune homme était trop las de cette querelle à peine dissimulée pour faire encore mine d'accorder le bénéfice du doute à son interlocuteur. Ce dernier pouvait bien le prendre pour un incompétent, Langdon, de son côté, se permettait de remettre en cause son assurance, car quand bien même il ne pouvait pas s'assurer du fait qu'Ethan soit vraiment en train de le mener bel et bien en bateau. Il n'avait aucune certitude, c'est vrai, si ce n'est une seule, mais qui n'était pas des moindres : à savoir que son interlocuteur lui tapait singulièrement sur le système, et dans les grandes largeurs, et ça, c'était une chose qui ne risquait pas d'être contredite à moins de faire preuve de mauvaise foi.

OK, il était en effet tout à fait possible que cet homme fortuné existe vraiment, mais tout de même, Langdon estimait étrange de ne pas en avoir entendu parler. Presque malgré lui, il avait côtoyé ne serait-ce que de loin presque tout le gratin new-yorkais. Et celui qu'il n'avait pas eu l'occasion de fréquenter, eh bien, il avait tout de même eu l'occasion d'en entendre largement parler, car c'était là le genre d'informations à côté desquelles on n'était pas supposé passer quand on faisait des études de journalisme. Bon, il était facile dernièrement d'oublier que c'était bel et bien ce qu'était Langdon, un étudiant, il n'empêche que c'était néanmoins le cas, et même si cela ne se confirmait certainement pas ces temps derniers, il avait fut un temps été un élève attentif et discipliné, plus que soucieux de ses études, avant tout parce qu'il y avait vu un moyen de rendre son père fier, un père trop préoccupé par la carrière et les ambitions de son autre fils pour y prêter attention.

-Vous n'avez toujours pas répondu à ma question, à savoir d'où lui vient sa fortune ? Ou bien vous avez besoin de plus de temps pour élaborer votre mensonge, peut-être.

D'accord, ce n'était pas la bonne réaction à avoir et certainement pas de cette manière que son interlocuteur allait accepter de lui répondre, sans doute. Mais il était sur les nerfs. Ethan avait su clairement où appuyer pour toucher la corde sensible. En même temps, ce n'était pas bien difficile, il suffisait d'évoquer son frère, et on était à peu près certain d'aboutir à un résultat relativement digne de ce nom. En attendant, il avait tout de même des raisons moins... personnelles d'interroger son interlocuteur. Il se demandait notamment d'où provenait la fortune de cet homme, car si celle-ci devait être sujette à controverse, ce serait faire très mauvaise presse aux fidèles de Salem. Et ils n'avaient clairement pas besoin de ça pour ça.

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angdon répondit aux explications de Bryce par un regard sceptique. Peut-être qu'il disait vrai, mais il en faudrait largement plus pour convaincre le jeune homme qui, en l'occurrence, choisissait de demeurer défiant. Il n'aimait pas être pris pour un abruti, ce qui ne l'aidait pas forcément à se montrer plus conciliant avec son interlocuteur qui, de toute évidence, était très fière de la supériorité affichée qui lui venait de nulle part et qui lui donnait peut-être le sentiment d'être plus important qu'un autre - même si, à l'heure actuelle, le fait est que ni l'un ni l'autre n'apportaient vraiment de réel progrès à la cause qu'ils étaient supposés défendre. Et ce n'était certainement pas en se tirant constamment dans les pattes comme ils en avaient pris l'habitude qu'ils allaient y changer quoi que ce soit.

Cela étant dit, Langdon continuait de trouver singulièrement suspect le fait de n'avoir jamais entendu parler du mystérieux donateur du nom de Sangster s'il devait vraiment sa fortune à son nom et à son héritage (et au passage, il ne pouvait s'empêcher de prendre la remarque d'Ethan pour lui-même, étant donné que tout héritier - à moins qu'il ait été déshérité maintenant - de l'empire Shaw qu'il était, il vivait dans une misère considérable sans l'appui financier de son père). Il était supposé connaître cette caste de la bonne société new-yorkaise, même si elle ne lui inspirait pas forcément les meilleurs sentiments. Mais il n'en était rien. Rien du tout, même. Il ne cherchait pas la petite bête, il voulait surtout protéger les fidèles de Salem d'éventuelles déconvenues s'il devait s'avérer au final que Bryce les menait en bateau, plus soucieux de satisfaire son petit égo que d'apporter des solutions réelles à un problème de taille.

-Je l'apprécierai quand cette solution aura effectivement porté ses fruits. Pour le moment, je n'ai qu'un nom et votre parole, c'est loin d'être satisfaisant. Mais je suppose que nous constaterons bien assez tôt combien votre précieuse contribution nous aura été infiniment indispensable, n'est-ce pas ? répliqua-t-il d'un ton cinglant et ironique, tout en fourrant ses mains dans ses poches.

Ils verraient, oui. Et au fond, si Bryce ne les menait pas en bateau, Langdon était même prêt à admettre que c'était une bonne chose, car au-delà de son orgueil et de son ego malmenés, il y avait tout de même l'intention et la volonté sincères de voir les choses changer, la situation évoluer. Pour le moment, ils stagnaient très largement, et c'était insupportable aux yeux de Langdon. Il estimait qu'il était grand temps que cela change... Il aimerait bien, il devait le reconnaître, que ce soit un autre que Bryce qui apporte une pierre trop significative à l'édifice, mais il était prêt à le tolérer. Pour la bonne cause.

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