Un client est un client // Ft. Bille & Jane

Je n’ai jamais tenu à jouer les vendeuses sur une grande allée commerciale. Pas de raison précise à cela si ce n’est que j’aurais un peu trop le sentiment d’être… comme tous les autres, alors que je considère que les articles que je vends ne peuvent pas être considérés comme de la bête marchandise. C’est ce que vous dira n’importe quel fabricant de baguette qui accorde une réelle importance à son art (car c’en est bien un) : créer une baguette, c’est une affaire de tripes, de cœur, c’est un truc qui dépasse nos simples et banales acceptions de consommateurs moyens… alors les vendre dans un bête magasin… Mais en même temps, il faut bien vivre, et je suis bien placée pour savoir que la concurrence est quand même sacrément rude. Donc il faut bien que je me plie au jeu… plus ou moins.

Avant, j’appelais ma boutique « l’atelier », parce que je ne confectionnais aucune baguette à l’avance. Je demandais au client de venir me voir, et en fonction de la personne, je m’appliquais à lui créer la baguette la plus adaptée à ses besoins et à sa personnalité, quitte à recommencer si la baguette en question ne voulait pas de son maître désignée. Mais mine de rien, comme le bouche à oreilles a très bien fonctionné, c’est devenu compliqué de poursuivre sur cette démarche, même si j’aurais bien aimé. Alors maintenant, j’ai bel et bien un commerce… mais je n’ai pas voulu jouer le jeu des grandes allées commerciales pour autant, question d’orgueil mal placé.

Même si je me ferais peut-être bien plus de gallions en me posant sur une rue plus passante (mais c’est des gallions que je perdrais bêtement dans un loyer outrancier), je me suis installée ici, dans l’un des quartiers les moins fréquentés et fréquentables de La Nouvelle-Orléans. Pour la peine, et grâce à ma petite réputation stupide acquise sans rien avoir demandé à personne, en dehors de quelques clients prestigieux (la baguette créée pour Seraphina Picquery reste ma plus belle création selon moi), j’attire beaucoup de gens louches… mais tant qu’ils paient.

Et ce jour n’allait pas faire exception. Alors que je suis dans l’arrière boutique, à polir les aspérités d’une de mes dernières créations, j’entends la porte s’ouvrir. Je fais acte de présence au comptoir pour tomber nez à nez avec deux femmes dont les visages me disent vaguement quelque chose sans me souvenir avoir vu les avis de recherche à leur effigie.

-Bonjour. Qu’est-ce que je peux faire pour vous ?

La question ne se pose pas vraiment. Elles ne sont pas là pour acheter des dés à coudre, mais c’est la formule d’usage on va dire.

Jane savait qu’elle pouvait compter sur Billie pour préparer et prévoir ce dont elles avaient besoin. Depuis leur passage en prison, les deux jeunes femmes avaient perdu leur baguette. Enfin, perdu n’était pas réellement le mot, on avait pris soin de leur prendre leur baguette et de les briser, parce qu’elles étaient de toute façon condamnées à terminer leur vie en prison. Mais ce n’était pas ce qui était arrivé et maintenant, il était quand même évident qu’elles avaient besoin de nouvelles baguettes. La jeune femme ne savait pas trop si elle allait parvenir à s’attacher à une nouvelle baguette non plus, mais ce n’était pas comme si elle avait le choix. Les affaires devaient reprendre, elles avaient besoin de pouvoir se défendre, mais surtout de servir leur maître du mieux qu’elle pouvait.

La jeune femme avait donc besoin d’une nouvelle baguette et pour cela, heureusement, elle pouvait compter sur son amie Billie. La veuve noire avait tout prévue, elle avait géré l’obtention d’un portoloin pour les mener à la Nouvelle-Orléans, où une fabricante de baguette s’était installée. Elle avait une réputation quelque peu sombre. Et il était évident qu’elles devaient se montrer vraiment prudente, ne pas aller juste dans une boutique de baguette normale au risque de se faire attraper par le MACUSA. Surtout que les Aurors allaient avoir sans aucun doute l’idée de les surveiller, parce qu’ils allaient se douter qu’elles auraient envie de se procurer une nouvelle baguette.

Les deux femmes arrivèrent sans encombre dans la boutique de Violetta Beauvais qui vint les accueillir. Billie prit la parole, affirmant qu’elles avaient malencontreusement vu leurs baguettes se faire dérobées, en ne rentrant donc évidemment pas dans les détails. Ce n’était pas impossible que la femme sous leurs yeux les reconnaissaient, après tout il y avait des affiches d’elles un peu partout. Mais Jane espérait quand même que ça n’allait pas être le cas et si ça l’était, qu’elle n’allait pas les dénoncer. Ce n’était pas pour rien qu’elles avaient fait ce chemin jusqu’ici. Et qu’elles n’avaient pas réellement la possibilité de le refaire, donc il fallait effectivement qu’elles trouvent rapidement chaussures à leur pied.

« On a beaucoup entendu parler de votre travail. » Affirma-t-elle alors, de son côté.

Même si en soit, elle n’avait pas eu non plus réellement besoin de dire quelque chose, parce que Billie avait parfaitement résumé la situation. Elles avaient besoin de nouvelles baguettes, c’était urgent parce qu’elles ne pouvaient pas envisager de rester sans aucun moyen de faire de la magie, elles avaient besoin de se défendre par exemple (en plus de pouvoir tout simplement utiliser la magie au quotidien), mais également pour attaquer si c’était ce que Grindelwald attendait d’elle. D’ailleurs, Jane ne savait pas comment Eleanora allait faire pour se procurer une nouvelle baguette, si elle l’avait fait peut-être déjà d’ailleurs. Encore un moment où elle regrettait que son amie ne soit pas avec elles.

Une très belle rousse avec beaucoup de prestance est la première à prendre la parole. J'ai beau fouiller dans ma mémoire, je n'arrive pas à me rappeler où j'ai déjà vu son visage, mais ça n'a qu'une moindre importance. Je ne suis pas regardante sur mes clients, même si je dois évidemment me méfier. Quand on traite avec des criminels, on doit bien évidemment craindre, à un moment ou à un autre, de supporter le revers de la médaille, mais je ne vais sûrement pas demander à ces deux femmes leur curriculum et leur pièce d'identité.

Leur baguette leur a été malencontreusement dérobée. Cela peut être vrai, mais j'ai appris depuis un moment que c'est là une excuse appréciée des plus grands repris de justice, qui pour certains, à leur sortie de prison, sont tout simplement interdits de réutiliser la magie. Je n'imagine tout de même pas que mes deux clientes sont échappées de prison. Je n'ai pas l'intention de m'intéresser à leurs histoires, du moment qu'elles ont de quoi tout payer. C'est au bout du compte la seule chose qui m'importe.

-Je n'en doute pas un seul instant, je réponds avec confiance quand la deuxième venue, une jeune femme au style particulier et charismatique reprend la parole pour m'apprendre qu'elles ont beaucoup entendu parler de mon travail.

C'est un fait, n'en déplaise à certain(s), je fais partie de l'élite des créateurs de baguettes en Amérique. Pas la plus populaire, pas la moins scandaleuse, mais une fabricante sur laquelle il faut compter, et dont les baguettes ont séduit les plus grands, à commencer bien évidemment par la grande Seraphina Picquery. Je fais du très bon travail, et même si elles se sont sans doute tourné vers moi parce que je ne risque pas de les livrer au MACUSA, j'apprécie que l'on me caresse dans le sens du poil. Même si, bien sûr, il ne suffit pas de m'abreuver de compliments pour entrer dans mes bonnes grâces. Je suis bien plus exigeante en ce qui concerne ce que j'obtiens en retour. Mes baguettes sont de première qualité. Certains s'imaginent que parce que je marche à la tête du client, le marchandage, le rabais ou l'intimidation vont fonctionner avec moi. Mais c'est mal me connaître. Ce n'est absolument pas le cas.

-Vous avez de quoi payer, je suppose ?

Jane s’était attendue à ce que la fabricante de baguette se montre plus curieuse, qu’elle leur pose des questions. Mais il n’en fut rien, elle se contenta simplement de leur demander si elles avaient bel et bien de quoi payer. Pour le coup, c’était effectivement le cas, elles avaient de quoi payer. Enfin, Billie avait de quoi payer pour elles-deux. Clairement, Jane ne savait pas réellement comment elle aurait fait pour s’en sortir sans l’aide de sa sœur de cœur. Elle lui payait beaucoup de chose, réellement beaucoup de chose. Jane avait un toit sur la tête, elle allait obtenir une nouvelle baguette et elle n’avait pas besoin de voler pour cela. Techniquement, Matildus avait un peu volé cet argent quand même, d’une certaine manière, mais elles n’avaient pas besoin de braquer cette boutique de baguette. Ce qui serait quand même sacrément dommage au vu de la situation, parce que les baguettes étaient normalement censées choisir leur sorcier, elles ne pouvaient donc pas prendre le risque de voler ces baguettes au risque de ne pas pouvoir s’en servir comme il le fallait.

Jane ne dit rien, se contentant d’observer son amie faire tinter une bourse pleine de gallion qui allaient servir à payer la fabricante. La jeune femme savait qu’il y avait plus d’argent que nécessaire, parce qu’elles ne pouvaient pas prendre le risque qu’elles parlent de trop. Ce n’était pas pour rien que les deux sorcières avaient décidé de se rende chez Violetta Beauvais, elles avaient entendu parler d’elle. Elles savaient qu’elle avait une réputation un peu plus sombre que la plupart de ses confrères, donc… autant qu’elles en profitent. Et si pour cela il fallait payer plus, Billie était capable de le faire.

La sorcière espérait que ça allait réellement faire l’affaire, parce que ce n’était pas non plus comme si l’or coulait forcément en abondance. Billie avait quand même beaucoup de ressource, et sans doute qu’elles pourraient trouver un autre moyen de gagner de l’argent, Jane avait bien l’intention de reprendre les affaires, mais ça ne voulait pas non plus dire qu’elles pouvaient ramener plus d’argent immédiatement. À choisir, Jane avait réellement envie d’avoir sa baguette ici et maintenant, elle n’avait aucune envie de devoir revenir plus tard. Elle se sentait tellement nue sans baguette, elle avait hâte de pouvoir en retrouver une. Surtout que mine de rien, elle savait qu’elle allait avoir le sentiment de retrouver réellement sa liberté, d’être enfin débarrassée totalement de cette prison qui hantait encore son esprit, quand elle allait avoir cette baguette entre ses mains. Ainsi, elle allait pouvoir être vraiment complète. Elle observait donc intensément la fabricante de baguette, attendant sa réponse.

Je considère avec convoitise le contenu de la bourse que me tend l'aînée des deux fugitives. Une sacrée somme. Bien au-delà de ce que je demanderais pour deux baguettes, mais je sais bien qu'il n'est pas juste question ici d'acheter les baguettes en question mais également de s'arranger pour que je me taise. Et ça a de bonnes chances de fonctionner. Je ne me considère pas comme une personne vénale, en revanche je veux bien reconnaître ne pas être insensible à l'argent. Je ne vais pas jouer les hypocrites, après tout. Qui en ce bas monde préférerait vraiment être pauvre que riche ? Il s'agirait de ne pas se faire passer pour un saint en prétendant ne pas être ému par une petite fortune sous la forme de pièces que je pourrais m'empresser d'encaisser. Oui, elles m'ont déjà convaincues. Ceci dit, si elles tentent d'acheter mon silence, je préférerais par la même occasion obtenir le leur.

Tout le monde sait que je flirte sans cesse avec l'illégalité, c'est ce qui a fait ma réputation pour le moins sulfureuse, cette réputation dont je ne me défends pas spécialement et dont j'aime bien, au contraire, jouer quand j'en ai l'occasion. Mais même si mille rumeurs circulent sur la composition de mes baguettes, quand bien même l'on s'imagine tout et n'importe quoi à mon sujet, au risque de tomber juste parfois, ce n'est pas pour rien si je ne suis pas en prison à l'heure actuelle, ce n'est pas pour rien si j'ai pu traiter avec la présidente du MACUSA en personne. Je suis prudente, et il y a des limites que je ne franchis pas.

-J'hésite, je réponds tout de même. Ce qui n'est pas vrai. J'ai l'intention d'accepter le marché en question, je veux juste protéger mes arrières, et pour cela, je pense qu'il est nécessaire de ne pas simplement empocher l'argent en faisant mine de. Si par un quelconque concours de circonstances, vos baguettes devaient vous être confisquées une nouvelle fois, je risque beaucoup. Qu'est-ce qui me garantis que l'on me dédouanera de toute responsabilité le cas échéant ?

Eh oui, je garde les pieds sur terre quoi qu'il advienne. Je ne veux pas tout perdre. Pas plus que ce que j'ai déjà perdu en ouvrant cette boutique;

Jane devait bien avouer qu’elle espérait ne pas avoir besoin de passer trop de temps à devoir convaincre la fabricante de baguette. Enfin, elle… disons à attendre que Billie parvienne à convaincre la jeune femme, parce que pour le moment c’était elle qui avait les cartes en main. En même temps, sa sœur de cœur était beaucoup trop douée dans ce jeu-là pour qu’elle ne la laisse pas faire et en prime, cet argent lui appartenait. Argent qui semblait vraiment faire de l’œil à Violetta Beauvais. En même temps, personne ne pouvait lui reprocher d’être attiré par cette somme d’argent, n’importe qui sauterait dessus. Jane la première en tout cas. Il y avait largement de quoi couvrir les baguettes et son silence, ça devrait suffire normalement et rapidement Billie et elle auraient leur nouvelle baguette.

Ou pas. En tout cas, la fabricante sembla émettre quelques réserves. Elle leur demanda ce qui se passer si jamais elles devaient se faire attraper et leurs baguettes confisquées de nouveau. Jane se retint de répliquer que ça n’arriverait pas, un peu trop vivement. Il était hors de question qu’elle retourne en prison, elle ne se laisserait pas attraper. Mais en même temps, la fabricante ne pouvait pas se contenter de cet argument. Billie répondit, lui affirmant donc que ça n’arrivera pas, mais en prenant quand même la peine de lui apporter une autre solution. Elles avaient des papiers d’identités qui seraient capable de tromper le MACUSA lui-même. Dans ces moments-là, Jane était tellement heureuse de pouvoir compter sur Billie pour négocier. Elle était un peu trop impulsive de son côté, alors forcément… elle aurait plutôt eu tendance à s’agacer des réticences de cette femme devant toute cet or.

« Après si c’est un trop grand risque pour vous… » Commença Jane, même si ce n’était pas forcément nécessaire. Mais elle s’impatientait, elle n’avait pas envie que Beauvais tourne la situation encore et encore jusqu’à finalement ne pas accepter leur offre. Alors qu’elles avaient besoin de ces baguettes. Elles n’avaient pas beaucoup d’autres choix en vérité, parce que les autres fabricants de baguette n’avaient pas la même réputation que la jeune femme. « On peut gentiment reprendre ce beau paquet d’argent et trouver quelqu’un d’autre qui l’acceptera. »

Bon, elle prenait peut-être un risque à dire ça, parce qu’elle bluffait clairement. Personne d’autre n’accepterait de les aider sans doute, alors il valait mieux éviter de jouer avec le feu comme ça. Mais c’était frustrant qu’elle n’accepte pas tout de suite alors qu’elle avait tout cet argent sous les yeux. C’était de l’argent facile ne plus. Billie lui apportait une solution en or, plus un paquet d’or justement, il n’y avait aucune raison qu’elle refuse quand même. Et il était temps qu’elles aient leur baguette. Jane avait besoin d’une baguette, elle en voulait une pour retrouver un peu de ce qu’elle avait perdu avant de se retrouver enfermée comme un animal. Elle devait accepter.

Oui, c’était pour cela que Billie négociait normalement, elle était plus douée pour ça.

La garantie seulement verbale que me donne Matildus Heizenbert ne suffit en rien à me convaincre. Oh, pensez bien que je veux bien croire qu’elle le pense, dur comme fer, je n’en serais en rien surprise tout du moins. Dans sa condition, je doute fort qu’elle ait envie de refaire un tour en cellule après avoir enfin échappé à la prison, à moins d’être singulièrement masochiste, ce que j’estime (sans en être entièrement sûre) qu’elle n’est pas. Mais elle ne devait pas croire non plus que qui que ce soit réussirait à la faire enfermer la première fois, et pourtant c’est arrivé, alors j’estime qu’il est légitime de se poser les bonnes questions, et plus encore de se méfier, ou en tout cas d’afficher le degré de défiance nécessaire aux circonstances présentes.

Malgré tout, elle me rassure un peu en me parlant des faux papiers d’identité qu’elle a fait façonner et qui me dédouaneraient à coup sûr si jamais le MACUSA m’interrogeait. Bien sûr, c’était sans compter sur le fait que les avis de recherche à leur nom pouvaient en soi m’aider à les identifier, mais c’est pour cela aussi qu’il existe des solutions telles que le polynectar. Bref, si les faux papiers en question sont réellement convaincants, alors mes deux invités gagnent du terrain. Je ne compte pas tout leur céder pour autant, certainement pas, mais c’est un bon début, présentons cela comme ça.

Miraforum embraya en jouant la carte du chantage habituel. Mais avec moi, ça ne prend pas. Je ne dis pas, elle aurait peut-être pu obtenir gain de cause en d’autres circonstances, mais moi j’estime que je n’ai pas besoin d’elles. Mais elles, elles ont besoin de moi. Nous ne sommes que quatre fabricants à en valoir la peine aux Etats-Unis. Et je suis la plus corruptible, tout le monde le sait. Ce n’est pas la meilleure réputation qu’on puisse se faire. Mais c’est la mienne, de réputation. Et je préfère en jouer que de jouer les innocentes. Un client est un client. Et moi, je dois bien manger.

-Ne la joue pas comme ça avec moi, je rétorque à Miraforum. Vous ne trouverez personne d’autre qui acceptera cette proposition en dehors de moi. Personne qui vous fournira de meilleure baguette non plus. En bref, si l’un peut négocier, c’est moi, pas elles. Surtout que je pourrais décider de les dénoncer n’importe quand. Je ne le ferais pas. Mais quand même. Ces faux papiers d’identité, je peux les voir ?

Je dois m’assurer qu’ils feront l’affaire avant de conclure le moindre deal.

Jane fronça des sourcils en entendant la réponse de la fabricante de baguette. Elle avait envie de lui rétorquer qu’elle avait tort et qu’elles pouvaient aisément trouver quelqu’un d’autre pour leur fournir une baguette magique, mais si elles étaient venues jusqu’ici, ce n’était pas pour rien. Elles avaient effectivement besoin de Beauvais, même si c’était difficile de le reconnaître maintenant. En tout cas, c’était évident, les propos de la jeune femme n’avait absolument pas permis de convaincre la sorcière, mais heureusement Billie avait quand même les choses en main. Parce que Violetta Beauvais demanda à voir les faux papiers qu’avaient promis son amie. Au moins, elles n’avaient pas perdu toutes leurs chances. S’il fallait, elles trouveraient un autre moyen de se procurer des baguettes, elles pourraient en voler, elles pourraient faire appel à quelqu’un de moins doué, mais dans l’idéal il fallait conclure ici et maintenant. Parce que même si Beauvais donnait le sentiment d’avoir sérieusement la grosse tête, elle n’avait pas entièrement tort dans le fait qu’elle était douée dans son domaine. Jane et Billie allaient avoir des baguettes de qualité si elles faisaient bel et bien affaire ensemble.

Billie sorti les faux papiers de sa poche et les tendit à Violetta Beauvais. Jane décida de ne rien dire du tout, au vu de comment elle s’était faite rembarrée précédemment, elle jugeait qu’il valait mieux qu’elle laisse son amie gérer les négociations. En même temps, elle était clairement plus douée qu’elle pour ce genre de chose, Jane avait tendance à trop foncer dans le tas. Elle observa donc la fabricante pendant qu’elle observait les faux papiers que Billie leur avait faite. Jane ne savait pas du tout comment elle aurait pu s’en sortir sans son amie, elle lui donnait quand même la possibilité de vivre sacrément confortablement depuis leur sortie de prison. Et avec un peu de chance, ou tout simplement le talent de son amie, elles allaient maintenant pouvoir avoir une vraie baguette qui en valait la peine.

Ce fut Billie qui brisa le silence pour demander à la sorcière si elles avaient un marché. Jane ne lâcha pas cette dernière du regard, attendant d’entendre sa réponse. Elle ne savait pas ce que Billie avait prévu si jamais Beauvais devait leur dire non, mais quelque chose lui disait qu’elle avait de toute façon tout prévu, parce qu’elle ne laissait rien au hasard. Et que quand elle avait décidé d’obtenir quelque chose, elle faisait tout pour l’obtenir. Jane aussi, mais ça se passait toujours d’une manière bien différente et c’était évident qu’elle ne pourrait pas convaincre Beauvais, au vu de la manière dont elle lui avait répondu.

Heizenbert me tend les faux papiers à sa disposition. Je prends le temps de les regarder dans le détail, je veux m'assurer qu'ils puissent passer pour des documents valides et officiels. Je veux prendre le moins de risques possibles. Et je dois bien constater que l'on s'y méprendrait à coup sûr. Si je n'avais pas conscience du pot-aux-roses, je suis certaine que je me ferais avoir. J'ignore à quel faussaire l'ancienne prisonnière à eu affaire, mais en tout cas, elle a de bonnes adresses. En même temps, dois-je en être surprise au vu des activités pour lesquelles Billie est renommée ? Non, pas spécialement. Et c'est tant mieux. Elle me donne les éléments dont j'avais besoin pour consentir à cette collaboration. Je laisse passer un temps de silence, je prends vraiment le temps de regarder ces papiers dans le moindre détail avant de finalement consentir d'un très léger hochement de tête.

-On a un marché, je confirme alors.

Je n'ai pas plus de raisons de refuser. C'est un risque que je prends, mais la compensation financière n'est définitivement pas négligeable, je serais bien bête de passer à côté. Je suis beaucoup de choses, c'est vrai. Mais stupide, certainement pas. Surtout que je sais bien qu'avec des éléments instables comme ceux avec qui je suis en train de négocier, un refus peut engendrer des conséquences bien sordides, et que je n'ai pas envie du tout d'affronter. Alors je préfère accepter ce marché.

-Repassez d'ici une semaine, même jour, même heure. Vous aurez vos baguettes.

Je m'y engage, et je n'ai qu'une parole. On me fait passer pour une personne tout sauf fiable, je ne l'ai pas volé. Mais je sais quand même où se trouve mon intérêt, et je n'y disconviens pas, je n'y disconviens jamais. Alors quand elles viendront la semaine prochaine, leurs baguettes seront prêtes, en effet, et ce seront les meilleures baguettes qu'elles pouvaient espérer obtenir. Parce que mes baguettes sont toujours les meilleures que l'on peut obtenir.

-Déguerpissez, maintenant.

Nous en avons fini, et je préfère, tant qu'à faire, qu'elles s'attardent ici le moins longtemps possible. Nous en avons fini, il n'est pas nécessaire de faire durer les choses plus que nécessaire. J'ai bien conscience de quels peuvent être les risques.