Dans la Gueule du Grand Méchant Loup {pv. Brivael Sullivan}

Le professeur de soins aux créatures magiques, Irina Baudlwick, m'avait demandé d'accompagner sa classe de septième année lors d'une étude sur terrain de quelques créatures. Il n'était pas rare à Dumstrang que ce genre de sorties éducatives soient organisées. Parfois elles pouvaient durer jusqu'à une semaine, rarement plus, et je trouvais cela assez formateur pour nos élèves. Rares étaient ceux qui pouvaient se vanter d'être aussi bien préparés à la véritable vie dans le monde magique. Beaucoup trop d'écoles ne faisaient sur surprotéger leurs élèves. Oh j'avais aimé Poudlard, bien sûr... mais je ne pouvais m'empêcher de me dire qu'il lui avait toujours manquer une part d'authenticité, une part de dangerosité... une part de réalité en vérité.

Nous étions partis il y a de cela trois jours déjà du côté de la Sibérie. Plus exactement au sein du massif montagneux de l'Altaï et aujourd'hui était le jour où nous allions étudier un troupeau de Grapcorne. Etant donné leur niveau de dangerosités, il fallait bien entendu respecter certaines consignes et nous espérions vraiment ramener tous nos élèves en entiers à l'école. Cela dit ici, nous étions tous un peu responsables de nos choix et ... les parents avaient signés une décharge à ce sujet lors de l'inscription. Dumstrang n'était pas Poudlard.

Spoiler:

Alors que le professeur expliquait les mœurs de ces animaux et leurs caractéristiques, j'entendis un hurlement féminin. Une mère et son petit prirent peur et se mirent à courir et tout le troupeau rappliqua tout autour pendant que nous nous abritions derrière des roches ou des arbres, suivant ce que nous trouvions. Lorsque le calme revint, j'allais dans la direction du cri afin de voir ce dont il pouvait bien s'agir tandis que la professeur reprenait son laïus en expliquant la manière dont la défense du troupeau s'était organisée rapidement.

Lorsque j'arrivais près de la jeune fille, je vis ce qui lui avait fait pousser son cri. Alors qu'elle s'était éloignée du groupe pour se soulager dans un buisson, elle était tombée sur le corps d'un homme. Sorcier ou non, je n'aurai su le dire au vue de sa tenue, mais il était inconscient. La première chose que je fis fut de vérifier son pouls. Bien que faible, il était bien présent, et je me demandais depuis combien de temps il pouvait bien être là. Dans la montagne les nuits étaient plus que fraiches, surtout à cette hauteur et je soupçonnais qu'il devait déjà être en hypothermie. Je n'étais pas médicomage mais... J'avais quelques notions de survie, apprentissage de mes années d'auror et avant de le bouger, je regardais sommairement s'il n'était pas blessé. Mis à part une blessure à la tête qu'il devait s'être fait en tombant, il semblait aller bien. Enfin bien... il ne se réveillait pas.

Je le pris alors dans mes bras et revint près de la professeur pour lui expliquer les choses ensuite je la laissais avec les élèves afin de retourner seul à notre campement. Ce soir nous devions rester au même emplacement et les yourtes étaient déjà montées. Le temps que les élèves rentrent, j'allais m'occuper de notre invité surprise.

Je l'installais dans ma yourte et entrepris de raviver les braises du feu pour faire monter la température de mon unique pièce. Je passais alors une main sur le front du jeune homme que j'avais trouvé, il était brûlant de fièvre. Je soupirais, je connaissais un sort basique de soin pour sa blessure à la tête mais j'espérais qu'il n'avait pas une commotion en plus. Je lançais le sortilège et la plaie se referma, je nettoyais ensuite sa peau avec une lingette humide mais cela non plus ne le réveilla pas. Son corps me semblait gelé... en même temps je l'avais trouvé endormi sur de la neige... Je me rappelais alors un roman moldu que j'avais lu dans ma jeunesse et je souris tout en commençant à le déshabiller. Je fis de même et me collait contre son corps afin que nos peaux soient en contact. Le plus sûr moyen de réchauffer quelqu'un de l'intérieur...
Pour une fois que j'avais un homme dans mon lit, je ne pouvais même pas en profiter.

*Quelle tête ferait-il s'il se réveille alors que je me suis endormi ?

Fut la dernière pensée qui traversa mon esprit avant que je ferme les yeux.

Un coup dans les côtes et le froid glacial... J'avoue que j'ai déjà eu des réveils plus agréables. Ma baguette est sous mon oreiller mais je peux déjà voir que je n'en ai nul besoin. Je suis nu, exposé au regard de mon invité qui lui est... véritablement trop excité pour une personne qui semblait mourante la veille. Je soupire en me massant ma côte douloureuse.

De ce que je comprends il a été surpris, s'est propulsé hors du lit à l'aide de son pied dans mes pauvres os, et a entrainé la couverture avec lui d'où... le froid. La situation est tellement incongrue que j'éclate de rire. Il est sur le dos comme une tortue incapable de se redresser, les pattes en l'air et l'air totalement perdu. Tordant.

Mon ventre se fait alors entendre et je me rappelle que je n'ai pas soupé la veille et au vue du chant des oiseaux à l'extérieur, nous devons être assez tôt le matin... Bon sang j'aurai vraiment aimé dormir plus longtemps tant qu'à faire... C'est alors que je réalise qu'il a parlé de Merlin. Un sorcier donc. Intéressant.

" Je crains que Merlin n'ait rien à faire dans l'histoire "

Ce qui me faisait penser que dans cette yourte, avec ma baguette dissimulée sous mon oreiller, rien ne pouvait laisser à penser que j'étais un sorcier. Je me demandais ce qui pouvait bien traverser l'esprit de mon invité surprise. Cela devait effectivement le perturber de se retrouver seul, nu, dans un lit et surtout avec un autre homme. Ca m'étonnait presque qu'il ne se mette pas à appeler l'inquisition tiens.

" Vous êtes dans ma yourte et ... on se présente toujours avant de questionner l'autre. Vous prendrez un café ? "

En parlant de yourte, il en faisait une petite avec ma couverture, de yourte, mon bonhomme tout choqué. Toujours nu et sans pouvoir me dissimuler, j'entrepris de me lever et de chercher un boxer aussi noir que mon nom avant de l'enfiler.

On dirait que sa tête lui fait mal si j'en juge par sa grimace et sa manière de tenir sa tête avec sa main. Visiblement je n'ai soigné que la surface mais pour la douleur interne je n'ai pas su faire grand chose. Etrangement je ne me suis pas doté de potion pour cette expédition et là j'en viens à le regretter. Je me demande si le professeur Irina a pensé à en prendre... Il faudra que je lui en parle lorsque je la croiserai. Pour l'instant peut-être devais-je commencer par rassurer mon pauvre petit oisillon blessé.

" Je suis enchanté de faire votre douloureuse connaissance Monsieur Sullivan, je suis Phineas Black "

J'aurai bien sûr pu lui donner mon nom complet ou lui dire que j'étais le deuxième du nom mais quelle importance cela pouvait-il avoir ici ? Je n'étais pas dans les cercles de sangs purs et nous étions bien loin des cours. Cela dit le nom des Black n'était pas inconnu de la plupart des sorciers... même des plus éloignés des grands de ce monde. Je me demandais si lui ferait le lien alors que nous étions si loin de l'Angleterre... quoi que même aux Etats-Unis j'avais des succursales.

" Une de mes élèves vous a trouvé inconscient dans la neige pendant notre sortie scolaire et je vous ai ramené à notre campement. Vous sembliez en hypothermie et vous aviez une blessure à la tête. Je l'ai guérie en surface "

Je hochais la tête alors qu'il me disait venir des Amériques mais j'entendais dans sa voix un accent anglais. S'il voulait me mentir c'était son choix. Avec ce qui se tramait actuellement du côté du monde sorcier, les gens commençaient à être de plus en plus prudents. Et ce même si je l'avais trouvé inconscient, seul dans la neige, à mille lieux de toute civilisation moldue ou sorcière. Oui... en fait il n'était peut-être pas si prudent que cela.

" Je ne suis pas natif de Sibérie mais je voyage beaucoup. Je connais assez bien New-York mais sinon je n'ai pas beaucoup voyagé en Amérique, j'avoue préférer le Canada "

J'eus un petit sourire tout en l'observant tenter de s'habiller. Je fis de même ou plutôt j'enfilais un pantalon et je passais une chemise ouverte. Pour l'heure cela me semblait suffisant, nous étions un peu trop tôt pour aller déranger Irina de toute façon.

Je sortis le thermos de café et d'un sort informulé j'en réchauffais le contenu. Cela, j'imaginais qu'il ne devait pas l'avoir remarqué... Après tout ce n'était pas comme s'il sentait les auras n'est-ce pas ? Avait-il déjà compris que j'étais un sorcier ? Pour l'heure il ne m'avait pas semblé y faire allusion.

" Vous auriez aimé ? "

J'eus un petit sourire presque lointain. Dans d'autres lieux cela m'aurait valu un bon sort entre les deux yeux pour avoir suggéré une telle chose mais... j'avais vérifié, il n'était pas armé, ni d'une baguette, ni d'une arme moldu. Totalement désarmé. L'avait-il perdu lors de sa perdition ? Je n'avais pas encore pu lui en parler. Pour l'heure je ne risquais pas grand chose si ce n'est qu'il me prenne pour un dévient.

" Je vous rassure il ne s'est rien passé, c'est juste la seule solution que j'ai trouvé pour vous réchauffer... "

Et je lui dis que je viens seulement de me rappeler qu'il existait un sort de réchauffement ? Non... autant ne rien ajouter de plus. Merlin je me demande bien quel auror je fais pour ne pas y avoir pensé en premier.

Cet homme qui me semble si jeune n'est décidément pas très prudent. Je viens à peine de le rencontrer qu'il me raconte sa vie, comme s'il me confiait sa vie parce que je l'ai sauvé... Il est dit dans notre monde que celui qui sauve une vie obtient dès lors une dette de vie. Je me demande si ce jeune homme le sait ?

Au regard de Magia, une dette de vie est toujours d'importance, et même si je ne la voulais pas, elle serait là.

Je l'observe. Je me demande qui il peut être au travers de ses paroles. Il a fait ses études en Angleterre et je ne connais qu'une seule école de magie en Angleterre : Poudlard. Mon école... Bien sûr notre différence d'âge semble d'importance et je ne pense pas que nous nous soyons croisés. J'imagine cependant qu'il a dû connaître et côtoyer Albus... Lui demander ? Cela n'a nulle importance. Qu'il le connaisse ou non, je ne serai pas différent avec lui.

" A Poudlard, je présume ? "

J'aurai pu continuer à jouer à l'ignorance du monde magique mais il avait parlé de Merlin et seul un sorcier sortait ce genre d'exclamation. Dans quelques heures il serait face à toute une jeune génération de sorciers alors... Pourquoi continuer de jouer les autruches ? Il semblait ne pas être un imbécile malgré qu'il me semblait avoir une faculté bien trop grande à faire confiance aux gens. Cela dit... ne faisait-on pas souvent confiance à son sauveur ? C'était une manière comme une autre lors de certaines guerres pour avoir des renseignements, mais cela... je n'avais pas besoin de le lui dire. Soit il était une personne lambda un peu perdue, soit il jouait diablement bien la comédie.

De diable d'ailleurs, il en avait l'allure. Fin, les cheveux longs, un visage plaisant, et de ce que j'avais vu de nombreux tatouages. C'était une chose fort rare... de ce que je savais, de nombreux yakusas faisaient cela mais d'honnêtes gens, il y en avait bien peu. Ce jeune homme ne semblait pas être un délinquant pourtant... Il avait parlé d'un patron l'ayant forcé à prendre des vacances, se pouvait-il qu'il trempe tout de même dans quelque chose de peu légal ?
Je n'étais pas homme à me formaliser de cela, travaillant parfois dans les ombres. Combien de fois n'avais-je pas traité avec les mafias locales... Je n'aurai su les compter.

Ainsi il avait caché sur lui des fioles de potions... A vrai dire je n'avais pas vraiment vérifié ses poches, me contenant simplement de le déshabiller au plus vite de peur que son état ne s'aggrave. Il semblait avoir prévu le coup d'être potentiellement blessé. Je ne savais si je devais le trouver prévoyant ou inconscient d'être parti seul sur les chemins éloignés de cette montagne.

" Vous semblez prévoyant et pourtant vous voyagez seul dans ces montagnes. Que cherchiez-vous donc ici ? "

Pouvait-il être un braconnier magique ? Un de ceux qui capturaient des créatures sauvages pour les vendre aux cirques ambulants et aux marchands de potions ? Cela me faisait penser à Newt, lui qui voulait tant protéger les créatures de toute sorte. Je n'aurai pas eu mes ambitions que j'aurai peut-être voulu devenir magizoologiste. Ceci expliquerait ces tatouages...à moins qu'il ne soit juste un jeune passionné par ce qui sort de l'ordinaire ?

J'hausse un sourcil à son évocation de mon matériel performant. Je penserai presque qu'il me fait du rentre-dedans si cela pouvait être possible mais personne n'est aussi peu prudent à notre époque n'est-ce pas ? A moins de n'avoir peut-être pas toute sa raison ? Je ne sais que penser de ce jeune homme. Il est vrai que jusqu'alors, il ne m'a pas semblé très prudent. Je me demande comment il peut-être encore en vie... Il serait presque un cas d'étude.

" L'une de mes activités professionnelles consiste à y enseigner oui mais ce n'est pas là mon occupation principale. J'ai souvent affaires en Angleterre "

Medicomage à New York ? Oui pourquoi pas. J'avoue que je ne le voyais pas du tout médecin mais je crois que personne de ma famille ne m'aurait vu auror et pourtant je l'ai été. Je ne sais que trop que les apparences peuvent être trompeuses et qu'un nom peut avoir bien trop de poids. Je ne lui ai fait aucune remarque et pourtant je me dis qu'il a du prendre mon regard un peu trop lourd sur lui comme du jugement de ses actes. Ce n'était pas mon intention. Peu m'importait ses actions, je voulais juste comprendre qui il était. J'aurai sans doute du me montrer plus discret, je ne sais. Il m'est cependant impossible de revenir en arrière. Je n'ai pas l'ombre d'un retourneur de temps sous la main...

" Le surmenage ? Je peux comprendre, je ne compte pas souvent mes heures non plus. Il est vrai que le milieu est un peu hostile mais avec un bon guide vous pourriez sans doute mieux vous en sortir. Nous restons encore trois jours ici, rien ne vous empêche de rester avec nous. Je peux éventuellement vous dupliquer ma Yourte "

Je réfléchis un instant. L'espace ne serait peut-être pas suffisant à notre prochaine halte pour contenir une yourte de plus. Je m'étais peut-être quelque peu avancé.

" Quoi que je viens de penser que notre prochain lieu de halte est un peu plus restreint qu'ici, je ne sais pas si cela vous dérangerait d'éventuellement partager la mienne ? Je sais que je suis un inconnu pour vous mais... Cela vous épargnerait peut-être de rentrer bredouille de votre périple ? "

Un périple qui avait failli lui coûter la vie. Il serait sans doute dommage qu'il rentre la queue entre les jambes comme un jeune chiot réprimandé s'il s'était donné un but. Personnellement je pense que j'aurai mal vécu un abandon obligatoire et j'avais un peu peur qu'un soi-disant retour ne le fasse juste se cacher de nous pour revenir seul et cette fois perdre sa vie pour de bon. J'avais en tout cas l'impression confuse qu'il me cachait quelque chose. J'avais toujours été un peu trop perspicace pour ces choses-là.

" Je pense que nous avons tous un ami qui n'approuverait pas  "

Je souris avant d'ajouter :

" Mais même si c'était le cas, je ne suis pas là pour vous juger "

Dette de vie... il a été bien formé, il sait. J'avoue que je ne comptais pas la lui faire remarquer et certainement pas épiloguer longuement pour faire de lui un esclave dévoué de ma personne. Je souris. Je ne pouvais bien sûr pas lui dire de l'oublier car Magia, elle, n'oublierait pas et nous le savions tous les deux.

" J'espère quant à moi que vous n'aurez jamais à la payer. Je ne cherchais nullement à détenir votre vie entre mes mains en vous sauvant  "

Mon regard passe sur son corps et je remarque qu'il semble toujours en forme malgré notre discussion. Un gentleman n'a pas à laisser son regard errer ainsi sur l'autre et je me détourne rapidement avant de m'emparer d'une tasse pour le servir. Le café... j'avoue que je l'ai dans ma yourte pour Irina... Personnellement je préfère nettement le thé ou encore le chocolat chaud bien que ce soit une boisson généralement dévolue aux enfants. Etant anglais de naissance, j'imagine que c'est la raison pour laquelle le café me laisse généralement un goût amer en bouche.
Je prends une seconde tasse pour moi et y verse alors de l'eau d'un autre thermo que j'ai préalablement réchauffé de la même façon qu'auparavant et j'y glisse alors un sachet de thé mangue et citron vert. Le thé frais est aucun doute meilleur mais ici... j'ai paré au plus simple.

" Petits gâteaux ?  "

Je lui tends une boîte ronde en fer contenant des spéculoos ... Un petit péché que j'ai ramené d'un de mes voyages en Belgique, tentative d'un jeune boulanger moldu à mon avis promis à un grand avenir. Je pense que ce sera une découverte pour lui, je me demande s'il va aimer...

" Je me serai une joie d'être votre professeur si vous ne deviez pas vous reposer. Ne m'avez-vous pas dit que vous étiez en vacances ? Je ne suis malheureusement pas le professeur de soins aux créatures magiques même si j'ai quelques connaissances. Je pourrai toujours vous présenter ma collègue pour quelques discussions amicales "

Je lui souris. Professeur, oui... J'aurai pu lui enseigner, mais d'autres choses. J'avais pu apprécier son corps contre moi même si la situation ne s'y prêtait pas et il m'avait semblé tonique. Pas exagérément musclé mais fin... ferme. Mon esprit n'avait pas à divaguer en ce sens.
Quant à mes autres capacités, je doutais qu'il soit adepte de la magie dite sombre. Les gens de Poudlard avaient, je le savais, beaucoup d'apriori face à une magie un peu plus brute, un peu plus dure et sauvage. J'imaginais que lui-même n'y faisait pas exception malgré qu'il me semblait un peu rebelle, au vue des marques à l'encre sur son corps. Elles mettaient celui-ci en valeur, d'ailleurs.

" L’erreur est humaine. Persévérer est diabolique. Tentez de prendre soin de vous à l'avenir. Cela aussi est un apprentissage et à ce que j'ai compris, c'est un peu ce que votre employeur, je crois, à tenter de vous apprendre en vous ordonnant de prendre des vacances. Apprendre à s'arrêter est aussi important que d'apprendre à travailler si ce n'est plus "

Je sépare le sachet infusé de mon thé et j'y trempe les lèvres pour en savourer le mélange. Un sourire de ma part répond à son compliment sur le biscuit que je lui ai proposé. Je note dans un coin de mon esprit que le sucré lui plait.

" Il s'agit d'un essai d'un petit artisan de mes connaissances. Je l'ai trouvé en Belgique et je dois dire que j'ai beaucoup aimé alors je lui ai demandé de m'en faire faire avant mon départ. Ils ont une étonnante conservation tant qu'on les préserve de l'humidité, je trouvais le goût assez exceptionnel  "

J'ignorais s'il avait quelque chose contre les moldus et je n'en fis donc pas mention. De toute manière que cela fusse l'œuvre d'un moldu ou d'un sorcier n'avait pas vraiment d'importance en cet instant, n'était-il pas ?

" Vous m'avez dit avoir une origine anglaise mais vivre aux Etats-Unis, n'est-ce pas ? l'Angleterre ne vous manque pas ? "

Je le vois chipoter avec son pantalon. Son petit problème semble le gêner et le fait qu'il n'arrive pas à s'en sortir ne peut qu'attirer mon regard sur l'endroit du délit. Je me demande si ça le gène ou si justement cela lui donne d'étranges pensées car son état, malgré le temps qui passe, ne semble pas se calmer. Cela me fait sourire et je tente de le cacher tant bien que mal dans ma tasse de thé. Je me suis connu bien plus stoïque par le passé mais j'ai l'impression d'être en vacances moi aussi en cet instant.

" Vous n'avez personne pour tenter de vous faire prendre le temps ? De vous aider à lever le pied ? "

Ce qui expliquerait qu'il soit parti seul dans une contrée des plus reculées. J'imaginais que de toute manière cet endroit n'était peut-être pas le plus accueillant pour un couple, surtout si on avait aucune notion de défense ou de survie. Je me demandais s'il aimait les partenaires fragiles qu'on devrait protéger ? Moi j'aimais les contrées sauvages... ceux qui avaient besoin de moi aussi...

" Il faut donc que je vous trouve une distraction ? "

Je ne pouvais continuer à me cacher dans ma tasse et mon sourire est maintenant bien visible. Seulement la situation s'y prête mieux, sans doute, car je ne fixe plus l'objet de son délit. D'ailleurs une petite voix dans ma tête n'arrête pas de me rappeler qu'il n'a toujours pas su fermer son pantalon et que je devrai peut-être que lui proposer mon aide.

" Si je ne le vous dis pas, vous serez obligé de venir me voir pour vous en procurer, n'est-ce pas ? Du coup je ne sais si je devrais vous révéler mes sources "

Fuir quelqu'un... ce n'est jamais bon lorsque l'on doit partir de quelque part pour fuir quelqu'un. J'avais quitté ma famille par choix, mais certains avaient vu là une fuite en avant. Fuite qui m'avait pourtant réussie au vue de ce que j'étais devenu aujourd'hui... Je n'étais bien sûr pas parti sans couvrir mes arrières.

Bien que j'avais été renié par les miens et que l'on aurait pu me considérer comme le petit mouton noir de la famille, j'étais un peu celui qui relevait l'honneur des siens, mais peut-être pas dans tous les milieux. J'avais eu beau ne plus être considéré des leurs par eux, j'avais tout de même mis un certain temps avant que les gens ne parviennent à me voir pour moi et non de part mes origines. D'ailleurs certains n'avaient jamais essayés.

" New York est une ville en plein essor mais je ne parviens pas à vraiment l'aimer. J'ai plus d'affinité avec Montréal au Canada, je la trouve plus pétillante et intéressante. Mais il est bien de trouver un endroit où l'on se sent vraiment bien. Je ne vis plus en Angleterre mais j'y ai mon principal travail si on ne compte pas mes nombreuses succursales de part le monde. J'aime investir dans les projets auquel je crois, voyez-vous ? Il est assez exceptionnel que je reste si longtemps auprès des élèves de Dumstrang. En général je tends à concentrer les cours que je donne sur un ou deux jours afin de pouvoir combler toutes mes occupations "

La première chose qui vient en mon esprit était que ce jeune homme était honnête, définitivement et totalement trop honnête. Je n'avais jamais vu quelqu'un dévoiler ses penchants aussi facilement à un inconnu alors que la situation n'était pas totalement propice.  Nous n'avions pas eu d'échanges de regards plus qu'évocateurs, pas vraiment non plus de perches tendues et pourtant il me révélait sa nature profonde qu'il aurait dû taire par prudence.
J'aurai pu le juger, le faire condamner...  Sous ses faux airs de bad boy, il me semblait un peu trop pur pour ce monde et je me demandais ce qu'il penserait de l'homme que j'étais.

" Vous êtes confiant, je pourrai être réfractaire à ce mode de vie "

Mais je lui souriais et de toute évidence je lui montrais bien que je n'étais ni choqué, ni dégoûté par le fait que ses penchants étaient, par la morale, réprouvés. Je me demandais si je devais lui dire tout de go que je partageais ses passions ou si je devais plutôt en jouer et le laisser se dépêtrer devant moi. Bien qu'il ne me semblait nullement gêné par ses révélations. Il me disait ne pas se confier facilement sur ce sujet en particulier et pourtant il tendait à ne faire nul mystère devant moi et je me demandais pourquoi. Il était impossible que les biscuits que je lui avais donné contiennent du vesiteratum... cela j'en étais certain. Ils avaient été faits par un moldu.

Il se rapprocha de moi et s'empara d'un nouveau biscuit avec un air de défiance qui me laissa échapper un rire. Un instant j'eus l'impression de voir un écureuil devant moi dans toute la gloire de son arrogance. Je l'imaginais presque avec une queue touffue derrière lui oscillant de défi... Il n'était dès lors pas étonnant que mon rire soit ma réponse à son acte.

" Vous a-t-on déjà dit que vous ressembliez à un écureuil ? "

Il n'y avait pas que son dernier acte qui me faisait penser à cela. Je me rappelais quelques lectures sur ces petits êtres de la forêt qui cachaient tant et tant de réserves et qui parfois jamais ne les retrouvaient car ils étaient quelque peu... têtes en l'air. Si lui et moi avions été proches, sans doute aurais-je pu l'appeler mon petit écureuil... du moins si ma petite comparaison ne le vexait pas. Après tout j'étais pour lui un parfait inconnu et voila que je me permettais d'être bien familier.

" Je suis le Directeur du Département de la Coopération Magique Internationale en Angleterre et il m'arrive de conseiller le ministre... Je ne suis professeur pour Dumstrang que pour la 6ième et la 7ième année et sinon et bien comme je vous disais j'ai des investissements un peu partout dans le monde et je m'occupe parfois de traiter mes affaires, du coup je voyage beaucoup "

Comprendrait-il dès lors que j'avais moi aussi difficile de me fixer avec quelqu'un ? Oh j'avais bien sûr eu des aventures et il fut un temps où j'avais une fiancée, bien que pas par choix, mais de relation fixe, durable... c'était un peu rêvé. J'avais plus souvent été voir du côté des moldus que des sorciers qui plus est afin de faire moins de vagues dans mon monde. Il était tellement plus facile de faire oublier une nuit à un moldu s'il devenait trop curieux.

" Je n'ai pas  pour habitude de garder longtemps près de moi ceux que je n'apprécie pas et certainement pas dans ma yourte "

Bien sûr je n'avais parfois pas d'autres choix que de fréquenter certains cercles et personnes mais je ne les invitais pas à envahir mon intimité plus que de raison. Dans le cas présent, le courant semblait bien passer avec ce jeune homme que je ne connaissais finalement pas et bien que nous avions sans doute tous deux nombres de secrets, il me semblait être un homme bien.

Malheureusement il posa la question qui fâchait, la question à laquelle je m'attendais. Je soupirais. Voila pourquoi je n'aimais pas dire tout de go mes responsabilités et qui j'étais. Quand je le faisais le regard des gens changeaient et leur attitude également. Comme si un titre vous changeait et vous définissait tout entier. Toute ma vie j'avais été soumis à cela et c'était sans doute l'une des raisons pour laquelle j'aimais tant le monde moldu. Parmi eux j'étais un anonyme, parmi eux je pouvais juste être moi et non un nom, ou une fonction.

" Voila pourquoi j'évite de commencer en donnant mes responsabilités, mon nom suffit déjà à changer le regard de bien des gens... J'imagine que vous demander de ne rien changer serait utopie ? "

Même si certains disaient qu'ils ne changeraient pas, chaque fois je ne pouvais que constater qu'il y avait quelque chose de cassé dans l'authenticité des personnes et même si je le déplorais je ne pouvais rien n'y faire. Déjà il tentait de se réapréter alors que je l'avais vu totalement nu. Cela n'avait pas semblé le gêner quand il pensait encore que j'étais un simple professeur.

Je replongeais mes lèvres dans mon thé pour le terminer et je lui tournais le dos pour lui laisser l'intimité dont il semblait soudainement avoir cruellement besoin. Il était temps que je m'apprête. Je pris ma baguette et me lançait rapidement un sort de rafraîchissement, très utile lorsqu'on ne pouvait pas prendre de douche et je boutonnais ma chemise en laissant deux boutons ouverts. Je me coiffais rapidement et entrepris de réduire rapidement les différents objets que je devais emparquer. J'avais comme l'impression que d'un instant à l'autre mon invité allait se trouver un empêchement pour ne pas rester ou une raison ou l'autre de me plaire pour une quelconque histoire de réputation. Bienvenue dans mon monde.

Je l'entendais gigoter pendant que je me préparais mais je faisais tout pour ne pas prêter attention à ses actions. Comme le parfait archétype de ce que devait être un noble de la haute société, je laissais sa liberté à mon invité quoi que la bienséance aurait sans doute voulu que je lui laisse totalement ma yourte et que je me prépare ailleurs. Que voulez-vous, je n'étais peut-être pas le meilleur hôte en cet instant mais j'étais en tout cas le seul qu'il avait pu trouver dans une contrée inhabitée. J'imaginais qu'il me pardonnerait cet écart comme j'étais censé pardonner son écart imaginaire envers ma personne.

" Je ne cherchais pas à paraître devant vous, juste à être "

Je haussais les épaules, quelle importance après tout. Mon titre l'avait fait frisonner tout entier et j'avais eu l'impression de me retrouver face à un enfant pris en faute la main sur le paquet de sucreries. Je manquais de sourire... n'avait-il pas justement la main sur son paquet de sucre d'orge ? Je devais rester sérieux, mais j'avouais peiner. J'avais envie de sourire, de faire comme si de rien n'était et d'être naturel et pourtant je me devais de faire l'être soudainement redevenu rigide si je voulais qu'il se morigène un peu. Manipulateur, moi ? Peut-être un peu. Mais j'avouais qu'il le méritait à mon sens, après tout c'était bien lui qui voulait soudainement me faire des ronds de jambes alors que je n'avais rien demandé.

" Voyez-vous ça, vous voulez vous inviter dans mon lit en plus de ma yourte ? Quel parfait gentleman, on sent tout de suite la rigidité de vos principes "

Je pouvais bien me l'avouer intérieurement, j'attendais qu'il soit gêné, peut-être même rouge, mais pas qu'il me fasse une déclaration si peu subtile. Comme une certaine connaissance, je maniais l'art du sourcil unique dressé avec brio et c'est ainsi que j'accueillis ses paroles.
Le deuxième sourcil rejoignit le premier au bisous déposé sur ma joue. Cet homme était surprenant, surprenant et totalement sans gène. Ça me changeait des béni-oui-oui habituels. C'était rafraîchissant.

" Avez-vous votre baguette quelque part sur vous ou avez-vous besoin d'aide pour vous préparer ? Vous me semblez en... difficulté manifeste "

Cette fois mon regard sur sa personne se trouvait être des plus éloquents. Alors qu'il m'avait semblé tenter d’enfermer comme il le pouvait son diable dans sa boite, ce dernier me semblait encore plus visible qu'auparavant si bien que je me demandai un instant si le fait de se faire rabrouer et malmener n'était pas l'un de ses fantasmes. J'aurai presque pu penser qu'il avait soudainement baissé son pantalon encore plus que tout à l'heure, mais c'était insensé, n'est-ce pas ?

Cette fois il n'a pas manqué mon regard. Il faut dire que je ne me suis pas caché non plus. J'avoue que je trouve que la couleur rouge sur son visage lui donne un certain charme. Cela fait longtemps que je n'avais pas gêné un homme de la sorte. Il est en même temps bien rare de découvrir un inconnu aussi ouvert. J'ai rarement vu un homme qui cachait aussi peu ses préférences et ses passions.

" Je vous avoue que je n'ai jamais cherché à savoir si une telle potion existait... Je n'ai jamais eu besoin de ce genre de produits... La douche froide aurait été mon remède mais je doute que vous souhaitiez sauter dans le lac en cette saison ? Ici c'est ainsi que nos élèves procèdent pour se laver mais... Ils ont l'habitude des grands froids et sans vouloir vous vexer... Je doute que vous apprécierez beaucoup "

On sent dans mon ton de voix que le rire n'est pas loin mais je tends à rester relativement sérieux. Mon regard pétille quelque peu montrant mon amusement grandissant cependant. J'ignorais s'il supporterait une telle température... Je craignais un peu qu'il tombe dans les pommes étant donné son état de faiblesse qui devait encore être fort présent. J'avais bien vu qu'il avait pris une potion mais cela ne pouvait tout résoudre. Parfois un bon repos était la clef même pour un sorcier. Par contre il ne m'avait pas répondu pour sa baguette. L'avait-il elle aussi perdu lors de son périple ? Je n'avais bien sûr pas évoqué son autre baguette dans ma question même si un sous-entendu aurait pu subsister intentionnellement.

" Que vous deviez ? "

Je m'amusais de le voir si gêné... Etait-ce vraiment mal de me jouer ainsi de mon invité ? Ce n'était peut-être pas des plus élégant, surtout que nous n'étions guère proches, mais j'avouais que cela me plaisait de voir ce jeune homme qui m'avait semblé si sûr de lui, perdre quelque peu de sa superbe devant moi en rougissant comme une adolescente. Un sorcier qui ne semblait pas porter un masque... c'était tellement plaisant.

" J'ai utilisé l'eau froide qu'il me restait pour faire mon thé, je suis désolé... Je peux toujours sortir et aller vous en chercher au lac ou juste vous laisser... vous occuper ? Je peux aller parler à ma chère collègue de votre présence mais... Je vous conseille de jeter un sort de silence...  "

Je lui fis un petit clin d'œil amusé avant de pousser la toile qui faisait office de porte. Déjà à l'extérieur la plupart des Yourtes n'étaient plus. J'étais en général prêt assez tôt et je sentis quelques regards interrogateurs quant à mon retard.

Alors que je supervisais les derniers préparatifs du départ, je lançais à ma collègue que j'allais voir où en était notre nouveau pensionnaire. Il était possible que je lui ai touché un mot de son état problématique... juste comme ça. Je n'avais bien sûr pas mentionné ni mes préférences ni celles de notre invité. Je n'étais tout de même pas un idiot fini.

Pas vraiment le choix ? Humm oui c'était assez certain. A moins qu'il n'aurait voulu que je l'aide. Et même si j'imaginais qu'il n'aurait pas été opposé à l'idée, ce n'était pas l'approche qu'il avait choisi. Je ne sais d'ailleurs comment j'aurai réagi s'il avait répondu favorablement à ma question. Devais-je être déçu qu'il ait choisi de passer ma proposition sous silence ou simplement me dire que même s'il semblait ouvert sur le sujet, il avait des manières ?

Sullivan, ce nom me disait quelque chose mais je ne parvenais pas à mettre le doigt dessus. Sullivan ce n'était pas un nom de sang-pur, cela j'en été presque certain mais j'avais entendu ce nom dans les hauts cercles. Une Sang-Pur n'avait-elle pas choisi un Sullivan pour se marier ? Oui ça me revenait... ma famille en avait parlé pendant des semaines mais je n'avais fait que survoler leurs échanges. Je crois que c'était la fille de la famille MacCoffin qui avait soi-disant fauté, d'après ma mère. Je n'avais ensuite plus suivi les histoires. Enfin cela n'avait guère d'importance en cet instant.

" La nécessité nous délivre de l’embarras du choix, mais un grand homme a dit un jour que nous avions toujours le choix, certains sont simplement plus difficiles que d'autres "

Et j'étais bien placé pour le savoir au regard de ma vie et des chemins que j'avais choisi au cours de celle-ci. On ne pouvait avancer sans choix et à chaque tournant important de la vie, il y avait un point fixe où tout avait basculé. En réalité la vie entière était faite de choix, à chaque instant, à chaque seconde, même le plus minime, un jour, pouvait avoir une importance capitale.

[...]

A mon retour à la Yourte, alors que je venais à peine de franchir la toile de l'entrée, je fus violement percuté par mon jeune invité et je perdis un instant mon souffle sous l'impact avant de me ressaisir et de le saisir avant qu'il ne bascule. Je n'imaginais pas être un tel roc.

" Que d'empressement à vous retrouver dans mes bras, j'ai cru que vous alliez en tomber à la renverse  "

J'éclatais d'un petit rire amusé avant de le relâcher sur ses pieds. Il semblait aller bien, les joues quelque peu rouge mais quoi de plus normal ? Toute la yourte sentait le sexe et je regrettais presque de ne pas être resté. Il avait beau m'être tombé un peu du ciel sans que je n'ai rien demandé, il était rare de trouver un joli minois qui partage vos inclinations.

" Vous êtes prêts ? Tous les élèves ont terminé, il ne reste plus qu'à replier la dernière yourte  "

A vrai dire sur le temps que je lui parlais, les derniers terminaient de tout boucler mais il était vrai que la plupart attendaient patiemment le départ. Nous en avions pour trois à quatre heure de marche, si mes souvenirs étaient bons, avant que nous arrivions au prochain lieu d'observation... et après, il faudrait encore installer le campement et manger bien sûr. Je me demandais s'il tiendrait après ses mésaventures... Je n'étais pas sûr qu'il puisse marcher aussi longtemps, et peut-être pas à notre rythme. Peut-être devrais-je demander à Irina de faire plus de pauses ? La connaissant, pas certain qu'elle y soit favorable... Ou alors rester en arrière avec lui ? Les élèves s'interrogeraient sans doute, ou crieraient au favoritisme... Enfin nous n'en étions pas encore là, si ça se mettait, je m'inquiétais pour rien.

Après être sortis tous les deux, je rangeais d'un sort ma yourte dans ma poche et nous pûmes nous mettre en route. Irina ouvrait la marche et je la fermais. Un moyen d'encadrer les élèves et d'éviter que certains s'égarent... De plus cela me permettait d'avoir une vue d'ensemble sur les environs et le cas échéant de protéger les élèves qui ne pouvaient le faire eux-mêmes.

Après près de vingt minutes d'une marche assez facile, les sentiers devirent de plus en plus étroits et escarpés et bien vite nous ne pûmes plus que nous tenir en file indienne. J'avais fait passer Brivael devant moi afin de pouvoir garder un œil sur lui. Alors que nous longions une paroi presque lisse bordant un précipice, je me tenais attentif, le moindre pied qui glissait ici pouvait avoir une issue fatale. Je n'imaginais même pas le calvaire que cela pouvait être pour quelqu'un qui avait le vertige. Heureusement, ce n'était pas mon cas.

" Tout va bien Monsieur Sullivan ?  "

J'ai levé les yeux au ciel à son rentre dedans éhonté. Je ne sais s'il plaisante à mon égard ou s'il désire vraiment quelque chose de moi. Les hommes qui ont nos penchants sont rares et si je ne lui ai pas dit que je partageais ses inclinaisons, j'imagine que le fait que je ne l'ai pas jugé le questionne ou l'intrigue. J'imagine que s'il est aussi ouvert, il a dû en connaitre des hommes, que ce soit dans notre monde ou dans celui des moldus...
Pour cette dernière variable je ne suis pas certain, bien sûr, nous n'avons pas encore pu évoquer ce qu'il pensait de ceux qui ne connaissent ni ne maîtrise la magie. Peut-être que comme beaucoup de sorciers, il les méprise. Je ne sais. Enfin...bien sûr, ils ne sont pas tous ainsi.

Après que je sois venu le rechercher, nous n'avons pas trainés et pas vraiment eu l'occasion de parler. La route étant escarpée, il nous fallait faire attention et puis je n'aurai su que lui dire si ce n'est lui parler de banalité comme le temps. Parler de choses sensibles ce n'était pas vraiment le moment.

Attentif, j'avais toujours peur qu'un élève dans cette zone ne joue au plus fin et ne perde l'équilibre. A Dumstrang, ils se révélaient en règle général attentifs, mais nous n'étions jamais à l'abris d'un règlement de compte et ici... cela aurait été si facile. Tout semblait se passer bien. C'est toujours ainsi que les évènements tragiques arrivent. Il y a toujours un moment de grand calme avant l'apocalypse, comme si la nature elle-même cherchait à prévenir du danger.

Je vis le pied de Brivael riper sur une aspérité, le pied tanguer dans le vide à la recherche d'une surface et ses bras battirent le vide comme s'ils cherchaient une prise. Trop tard, impossible, je le vis basculer dans le vide. Je plongeais sur lui...et je ne pus attraper que le tissu de sa veste entre mes mains. Malheureusement j'ignorais sa qualité, mais elle ne devait pas être très élevée car elle se déchira... dans ma main un simple bout de tissu et dans l'espace un grand cri, Brivael avait basculé. Ma baguette fut instantanément dans ma main et je lançais un sort de lévitation sur le corps virevoltant dans l'air. De ce que j'avais pu voir, son corps avait heurté violement la falaise avant d'être expulsé loin d'elle... Je me demandais s'il était encore conscient... la douleur pouvait l'avoir perdu, et si c'était la tête qui avait été touchée... il pourrait devenir amnésique...ou pire encore.

Je le ramenais sur le bord de la falaise, son corps étendu sur le sol pendant que les élèves cherchaient à se pencher pour mieux voir ce qui s'était passé.  Je me mis à fouiller les poches du jeune homme dans le but de trouver une potion adéquate pour le soigner. J'espérais en trouver une mais il faudrait sans doute quelque chose de puissant et... on se promenait rarement avec ce genre de chose. Rien, je ne trouvais rien. Je passais ma main dans mon cou... mon portauloin d'urgence pour me ramener à la maison... Là j'étais sûr de trouver ce qu'il me fallait mais... Il me fallait avertir Irina.

" Monsieur Sullvan ? Monsieur Sullivan est-ce que ça va ? BRIVAEL ? "

Je passais une main sur son front pour tenter de prendre sa température. Une certitude, il était vivant en tout cas car je le voyais respirer. En lançant un sort de diagnostic basique, je constatais qu'il avait une fracture de la jambe et surtout, il ne me répondait pas, il y avait du sang qui coulait de sa tête... Je donnais des consignes aux élèves et prenant sa main dans la mienne, je donnais le mot qui déclenchait mon portauloin avant de disparaître avec mon fardeau.

Nous arrivâmes directement dans au centre de ma pièce prévue pour les urgences, au cas où je serai moi-même en difficulté, un reste de mes années d'aurors et des activités parfois très limites que je pouvais pratiquer. Je fis léviter le corps du jeune homme dans un lit de fortune installé là et je lui fis boire une potion pour sa jambe après l'avoir remise en place d'un coup sec. Demain elle serait comme neuve... je l'obligeais alors à ingurgiter une potion pour sa tête... masser sa gorge pour qu'il avale... l'aider du mieux que je pouvais. Restait à attendre son réveil désormais.

S'il se sentait en forme demain nous pourrions rejoindre les autres au campement pour la fin de la sortie scolaire... et même s'il n'était pas en forme d'ailleurs, je ne pouvais de toute manière pas le laisser seul chez moi. Je regardais la grande horloge... Une idée...
Devancer les élèves et installer ma yourte au prochain lieu de camping aurait été une idée, mais elle me paraissait bien difficile à réaliser. Etablir un portauloin international aussi précis ne se faisait pas de manière aussi simple sinon tout le monde pourrait en faire.
Mon regard se perdit sur le corps alangui du jeune homme et je pris un tabouret pour me poser à ses côtés, pensif. Le feu de cheminette ne marcherait pas avec un feu de camps, cette méthode était donc aussi exclue pour les rejoindre. Refaire la route me paraissait aussi impossible étant donné ce qui venait d'arriver alors... De mémoire il y avait une cabane de berger à un kilomètre de notre prochaine halte... c'était la solution mais pour cela il fallait attendre qu'il reprenne conscience.

" Brivael, Brivael, qu'est-ce que vous me faites faire...  "

Deux fois que j'abandonnais Irina avec les élèves en moins de vingt-quatre heures et je venais tout juste de le rencontrer. De là à penser que ce jeune homme avait du sang de Sinistros dans les veines, il n'y avait qu'un pas.