L'amitié est la communauté des secrets [pv Cherryl]

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arlene appartenait à cette catégorie incompréhensible de personnes qui aimait les gens. Sincèrement, fondamentalement, et sans une once d'ironie. Elle aimait le genre humain, et aussi et surtout, elle croyait dans le genre humain, ce même si son expérience personnelle aurait pu parfois la pousser à voir la vie autrement. Pour autant, elle n'était pas entourée d'une multitude d'amis non plus, mais il fallait mettre cela sur le compte de sa réserve naturelle. Il n'était pas évident pour Darlene d'aller vers les autres, et les amis qu'elle possédait l'étaient bien souvent devenus à force de patience, parce qu'ils avaient réussi à l'inviter à s'ouvrir.

Cela ne dérangeait pas Darlene de n'avoir qu'un nombre restreint d'amis. Peut-être qu'elle n'en avait pas tant, mais au moins savait-elle qu'ils lui étaient précieux, et qu'elle pouvait compter sur eux en toutes circonstances. Et elle voulait croire qu'ils pouvaient compter sur elle également. Même si dans certains cas particuliers, le secret et le mensonge avait un peu retiré de l'authenticité de ces amitiés. Ce n'était pas faute de vouloir parler, pourtant, surtout que Darlene n'avait rien d'une menteuse née, mais si elle n'avait pas résisté à l'envie d'apprendre toute la vérité à Wade, elle ne réitérerait pas.

Elle ne pouvait donc rien dire à Cherryl de ce qu'elle savait de tout un pan crucial de sa vie qu'elle avait à présent oublié. Parfois, elle caressait l'espoir qu'en disséminant certains indices, la mémoire lui revienne, mais la magie, Illan le lui avait bien fait comprendre, ne fonctionnait pas ainsi. Qu'importe, cela ne l'empêchait pas de vouloir être présente pour Cherryl, bien au contraire, même, ça n'avait jamais fait que renforcer son envie d'être présente pour elle. Raison pour laquelle elle avait invité son amie chez elle ce soir-là, afin qu'elles dînent ensemble. Wade ne serait pas là de la soirée, elles seraient donc tranquilles. Même si cela ne faisait pas si longtemps que cela, Darlene avait le sentiment que son amie et elle n'avaient pas eu l'occasion de se voir depuis une bonne éternité, et elle était impatiente de remédier à cela. De toute façon, elle serait la dernière à traîner des pieds à la perspective d'un dîner entre amies.

La table était prête, le repas presque prêt, le ménage impeccable quand on frappa à la porte. Ni une ni deux, Darlene alla ouvrir, sourire aux lèvres.

-Salut, entre ! Comment tu vas ?



   
   

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arlene était une personne altruiste, elle avait besoin que les personnes autour d'elle soient heureuses pour réussir à l'être à son tour, et elle était donc ravie de savoir que Cherryl allait bien, d'autant qu'elle paraissait entièrement sincère en prononçant ces mots. Peut-être, oui, qu'elle pourrait l'être davantage si son destin et sa mémoire n'avaient pas été mis entre les mains d'autres personnes, comme ça avait été le cas pour Darlene, qui ne savait s'empêcher de se demander ce qu'aurait été sa vie si on n'avait pas éloigné son frère d'elle sans qu'elle ait son mot à dire, sans même qu'elle s'en rende compte...

Mais pour l'heure, ce qui était était, elle n'avait pas le pouvoir d'y changer quoi que ce soit, mais elle avait en revanche le pouvoir de faire que le sourire de Cherryl ne s'efface pas. Elle espérait, tout du moins, avoir bel et bien le pouvoir de lui faire passer la meilleure soirée possible, et elle comptait bien mettre les bouchées doubles pour que ce soit bel et bien le cas. Un bon repas et une conversation cordiale, c'est ce qui les attendait. C'était plutôt une bonne base, non ? En plus, la jeune femme lui annonça d'entrée de jeu qu'elle avait faim. Tant mieux, elle allait être servie, dans tous les sens du terme.

-Ca tombe bien, j'ai préparé de quoi nourrir tout un régiment, déclara-t-elle en plaisantant certes, mais avec un fond de vérité quand même. Darlene refuserait catégoriquement que son invitée manque de quoi que ce soit. Et donc, pour la peine, elle avait préparé de quoi manger en quantité. Ce sera prêt d'ici quelques minutes. Mais en attendant, je nous ai préparé de quoi patienter.

Pour illustrer son propos, elle alla leur chercher deux verres d'un cocktail maison (sans alcool, on fait avec ce qu'on a, et Darlene buvait très peu) à base de jus de fruit pressé dans l'après-midi.

-Alors, comment ça se passe pour toi ? demanda-t-elle en tendant son verre à Cherryl avant de l'inviter, d'un geste, à trinquer. Le travail ? ... Les amours ?

Elle voulait tout savoir, et elle espérait que tout allait vraiment pour le mieux dans la vie de Cherryl. Peut-être même aurait-elle une bonne nouvelle, qui sait ?


   
   

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arlene afficha une moue désolée quand Cherryl évoqua son frère en parlant du fait qu'il devenait "cinglé". C'était typiquement dans ce genre de situations qu'elle devait se mordre la langue pour ne pas juste cracher le morceau, pour soulager sa conscience et ne pas voir se déchirer des personnes que la vérité pourraient rassembler. Cherryl lui avait un peu parlé de l'engouement de son frère pour les fidèles de Salem. Via Illan, Darlene était à même de comprendre la dangerosité de ce groupe. Ce n'étaient pas juste des fanatiques qui embrigadaient des personnes innocentes dans leurs délires, il y avait malheureusement du vrai renfermé dans leurs spéculations. Si Cherryl avait connaissance du monde des sorciers, elle serait sans doute capable de trouver un terrain d'entente avec son frère, et elle réussirait à le raisonner afin qu'il abandonne de son propre chef la secte des Barebone. Mais ça, ce serait dans un monde idéal.

Mais ce monde n'était pas idéal, sinon, ce serait un monde qui lui aurait permis de connaître son frère et de grandir avec lui, en gardant précieusement chacun de leurs souvenirs communs. Qu'importe, Darlene comprenait que c'était un sujet dont elle ne pouvait malheureusement pas parler : les frères, c'était de toute évidence un sujet proscrit. Il y en avait d'autres à aborder, ce n'était pas bien grave. Malheureusement, ils n'étaient pas forcément plus reluisants. Ses collègues étaient des crétins matchistes... Ce n'était malheureusement pas quelque chose de surprenant. Heureusement que Cherryl était une femme forte et qu'elle avait la tête sur les épaules, dans le cas contraire, elle perdrait sans doute bien vite pied face à cette bande de dégénérés. Darlene était fière de son amie, de la place qu'elle tenait. Ce n'était clairement pas elle et son petit boulot de dactylo qui faisaient progresser la société, alors elle aimait en voir d'autres réussir à le faire.

Quant aux amours... Elle avait su ce que c'était, et Darlene ne savait même pas vraiment ce qu'elle devait lui souhaiter : retomber sur ses pattes et trouver quelqu'un qui lui convienne, ou retomber par elle ne savait quel miracle dans les bras de Jane, avec tous les désagréments et toutes les complications que cela suggérait forcément. Bref, rien de bien positif dans le bilan que traçait son amie, et Darlene en était désolée. Elle aurait aimé qu'il y ait au moins un petit quelque chose de positif là-dedans.

-Tu finiras par savoir, répondit Darlene en essayant de remonter le moral des troupes. Pour ce qui est de tes collègues, ils sont juste jaloux, si tu n'étais pas plus doués qu'eux, ils ne ressentiraient pas à ce point le besoin de te rabaisser, ils sont juste blessés dans leur orgueil de mâle. Et pour ton frère... c'est sûrement une passade, t'en fais pas.

   
   

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arlene afficha un sourire quand son amie la qualifia de voix de la raison. Elle n'était absolument pas certaine de l'être, mais elle appréciait ces mots malgré tout, parce que c'était ce qu'elle s'efforçait d'être dans tous les cas. Elle ne demandait qu'à être le soutien le plus précieux possible pour ceux qui lui étaient proches. Et dans le cas de Cherryl, c'était d'autant plus le cas qu'elle portait pour elle un secret dont la jeune femme n'avait même plus le souvenir. Pour la peine, elle estimait que faire en sorte qu'elle soit heureuse et positive au quotidien était le mieux qu'elle puisse faire. Elle avait le sentiment que ça fonctionnait, Darlene avait l'air de bonne humeur, et si elle pouvait y être, même un tout petit peu, pour quelque chose, alors elle-même se sentait bien évidemment beaucoup mieux.

-Eh bien, dit-elle quand Cherryl lui retourna la question. Des choses à raconter, Darlene en avait toujours, c'était savoir par où commencer qui pouvait se révéler difficile, en réalité, mais après tout, ça ne lui posait pas de problème. Darlene était réservée avec les personnes qu'elle ne connaissait pas, mais jamais avec ses amis, et une fois les vannes ouvertes, il était parfois difficile de les refermer. Question boulot, c'est vraiment la routine. Je peux toujours pas dire que je fais le boulot de mes rêves, mais je fais avec, c'est pas si mal. Pour le reste...

Elle avait très envie de lui parler de son frère, et de tout ce qu'impliquait ses retrouvailles avec lui, mais bien sûr, c'était un sujet qu'elle ne pouvait pas se permettre d'aborder. C'était réellement frustrant. C'était une chose qu'elle aurait pourtant envie de partager avec toutes les personnes dont elle se sentait un tant soit peu proche. Elle avait vécu sans son frère pendant une éternité, et maintenant qu'il était de retour dans sa vie, elle devait en garder le secret, elle trouvait ça franchement injuste. Mais tant pis, elle garderait ça pour elle. Si elle devait se décharger et en discuter, au moins, elle avait Wade. Et pour le reste... il y avait tout de même quelques sujets qu'elle pouvait aborder en compagnie de Cherryl, et qui eux aussi lui pesaient sur le coeur.

-Et côté coeur... Le calme plat... Si ce n'est que j'ai revu Emmett, récemment. Par hasard, je précise.
   
   

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e qu'il s'était passé avec Emmett ? Elle craignait fort que quelques mots ne suffisent pas à l'expliquer, surtout s'il devait être question d'entrer dans les détails, et donc de parler d'une vérité qu'elle ne pouvait évidemment pas exprimer. C'était compliqué. Darlene était encore sous le choc des révélations que le jeune homme lui avait faites. Est-ce que ça expliquait et pardonnait tout ? Elle n'en était pas certaine, mais ça lui donnait du moins un semblant de réponses à toutes ces questions qui l'avaient tant et tant taraudée.

La jeune femme avait aimé Emmett, comme personne d'autre... et au fond, elle l'aimait toujours, le plus dur pour elle avait été de supporter le voir partir sans lui donner d'explications. Maintenant, les explications, elle les avait, et elle savait à peine quoi en faire, d'autant plus qu'elle ne pouvait pas en parler librement à ses amis, alors qu'elle en mourait évidemment d'envie. Heureusement, elle pourrait partager son ressenti avec Wade, mais il était bien le seul à pouvoir être mis dans la confidence. En parler à Illan, qui était le seul autre sorcier de son entourage à sa connaissance (mais à force elle se posait des questions), c'était exclu, connaissant son frère, il se mettrait dans une rage folle. Et pas forcément déméritée, en vérité.

-Plus ou moins, répondit Darlene avec prudence.

Elle ne corrigea pas son amie quand cette dernière évoqua le comportement d'enfoiré d'Emmett. Peu importe ses justifications, Darlene continuait de considérer, elle aussi, qu'il avait agi en enfoiré. Parce que peu importe ses raisons, il l'avait abandonnée, purement et simplement, et son coeur en était encore terriblement blessé.

-C'est sa mère, une vraie tarée, qui lui a interdit de me revoir. Et lui il a obéi.

Voilà, un résumé qui excluait une tranche importante de la vérité, mais qui n'était pas entièrement faux ceci dit. Darlene voulait croire que si la mère d'Emmett ne faisait pas partie du tableau, Emmett et lui seraient encore ensemble, à l'heure qu'il est. Après tout, le fait qu'il soit un sorcier ne l'avait jamais vraiment fait reculer jusqu'alors. Rien qu'annoncer cette fraction de vérité à son amie lui faisait du bien, la libérait d'un poids, même si ce n'était pas encore assez.
   
   

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ui, Darlene avait effectivement cru Emmett quand ce dernier lui avait parlé de ses raisons. Ce n'est pas pour autant qu'elle avait trouvé ses raisons valables ou acceptables, loin de là, mais elle l'avait cru. Emmett n'avait jamais été malhonnête que par omission, ce n'était pas dans son caractère. Oui, il lui avait menti sur sa nature, mais elle savait très bien pourquoi il l'avait fait. Quant au reste. Il ne lui avait jamais menti sur les raisons de son départ puisqu'il avait pris le plus grand soin de lui dissimuler ces mêmes raisons en disparaissant du jour au lendemain. Donc oui, elle le croyait. Est-ce qu'elle le pardonnait, en revanche ? C'était une autre affaire.

-Non, je l'ai jamais rencontrée, mais j'ai entendu parler d'elle, par contre... Et je t'avoue que c'est ce que je me suis dit aussi... Il est... totalement dépendant d'elle. Je crois que c'est le genre de mère poule qui l'a sacrément couvé. Au début de notre relation, il parlait d'elle constamment, je ne pense pas qu'il s'en rendait compte, c'était plus par réflexe. Puis j'avais eu l'impression que ça lui était passé, mais visiblement...

Visiblement non. Il avait suffi que sa mère apprenne l'existence de leur relation pour qu'Emmett choisisse d'y mettre un terme. Il n'avait pas cherché plus loin. Elle pourrait se rassurer en se disant qu'il avait cherché à la protéger de ce qui pouvait lui arriver si on apprenait qu'elle connaissait l'existence de la sorcellerie, ou encore se dire qu'il n'avait pas voulu briser les règles très strictes du monde la magie (règles que son propre frère était supposé avoir vocation à faire respecter), mais elle savait pertinemment qu'il n'en était rien.

Non, ce n'était pas du tout ça qui l'avait motivé... Peut-être que, oui, il l'avait sentie en danger et avait voulu la protéger... Mais ça ne justifiait pour elle ni son départ ni son silence. Elle voyait bien que Cherryl n'avait pas l'intention de donner des circonstances atténuantes à Emmett, mais ça lui convenait très bien. Ce n'est pas ce qu'elle demandait. Elle, ce qu'elle demandait, c'était que son amie se montre honnête. Et son opinion lui permettrait peut-être de se faire une meilleure opinion de la situation.
   
   

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arlene était du même avis que Cherryl, elle trouvait également étrange à l'âge d'Emmett, où on était supposé s'être émancipé depuis longtemps de l'influence de ses parents, d'être encore à ce point dépendant de sa mère. Elle savait, bien sûr, qu'Emmett n'avait jamais connu son père et que sa mère l'avait sans doute d'autant plus protégé qu'elle n'avait eu que lui, mais dans tous les cas, cette emprise aurait dû trouver un terme, d'une manière ou d'une autre. Emmett devrait réussir à se libérer de cette emprise. Certes, il lui avait assuré qu'il avait fait des efforts de ce côté-là, mais la jeune femme n'était pas convaincue du tout du fait qu'il puisse en être capable. Cette femme avait la mainmise sur sa vie... il l'aurait sans doute toujours s'il la gardait dans son sillage. Et en même temps, comment demander à un fils de se séparer de sa propre mère, peu importe son âge ?

De ce point de vue-là, Darlene l'avait très vite compris, ils résonnaient tous deux d'une manière bien différente, et c'était compréhensible. Darlene, elle, avait grandi avec ses deux parents, et après ce qu'elle avait découvert via Illan, il était plus que certain qu'ils étaient du genre à considérer que l'oiseau devait quitter le nid et vivre sa vie. Elle ne pouvait rien lui reprocher... du moins plus maintenant, mais ça lui faisait mal quand même. Parce que maintenant qu'elle l'avait retrouvé, elle réalisait à quel point il lui avait manqué. Ce n'était pas une surprise, évidemment, mais c'était encore plus certain, à présent. Et elle tenait encore terriblement à lui. Dire que cette rencontre l'avait bouleversée était un euphémisme, en effet. Elle en était encore complètement retournée, à vrai dire. Et ça lui faisait du bien d'en parler avec Cherryl, d'autant que cette dernière ne mâchait pas ses mots, et c'était typiquement ce dont elle avait besoin pour faire des choix qu'elle regretterait plus tard.

-Complètement, oui. Quand il était en face de moi, j'avais juste envie... de faire comme si rien ne s'était jamais passé.

Et pourtant, elle n'était pas la dernière à savoir être rancunière. Mais Emmett avait été si attendrissant... Dans ses insécurités, il l'avait toujours séduite. C'était sa faute, au fond.    
   

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arlene afficha un fin sourire quand son amie vint déposer une main compatissante sur la sienne. En cet instant, elle avait définitivement besoin de ça. Ce n'était pas grand-chose en soi, mais le moindre geste amical et affectueux lui faisait du bien. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle allait faire, ni à quel point ses retrouvailles avec Emmett allaient changer son quotidien ou non, mais ce qu'elle savait à coup sûr, en étant certaine de ne pas se tromper, c'est que ça changerait forcément quelque chose, profondément, dans son esprit. Sans complètement l'oublier, elle avait réussi à reléguer le jeune homme dans un recoin un peu moins accessible de son esprit, ce n'était plus le cas à présent.

Elle n'y pouvait rien, c'était aussi inévitable qu'absurde : elle y pensait tout le temps. La preuve, elle n'avait pas su se retenir d'en parler à Cherryl. Heureusement, cette dernière ne semblait pas lui en vouloir d'accaparer ainsi la conversation avec ses tribulations sentimentales et ses appréhensions toutes personnelles. Heureusement, parce que, de toute évidence, elle n'en avait pas encore fini avec Emmett. Est-ce qu'elle en aurait fini un jour. Elle ccommençait, l'air de rien, à se dire que ça ressemblait de très près à une histoire sans fin... à plus forte raison qu'elle rechignait très largement à y mettre un terme qui serait pourtant franchement préférable, chose qu'elle devrait savoir, concevoir et encourager.

Cherryl lui posa la question, la grande question, celle qu'elle n'arrêtait pas de se poser depuis cet épisode. Est-ce qu'elle avait une réponse précise à donner à cette question ? Elle voudrait bien, mais la vérité, c'était que c'était bien loin d'être le cas. Il y avait cet éternel débat entre son coeur et son cerveau, le premier l'encourageant à donner une seconde chance à son ex quitte à souffrir de nouveau, le second qui l'exhortait de ne surtout pas prendre cette décision hâtive. Comment pourrait-ce bien finir entre eux ? A bien y regarder, il semblait évident qu'il ne pouvait y avoir qu'une issue très déplaisante à toute cette situation, quoi qu'ils fassent.

-J'en ai pas la moindre idée, répondit-elle, déconfite. Il m'a fait tout un tas de promesses, mais je suis pas sûre de pouvoir le croire. Et j'ai pas envie de lui donner l'occasion de me briser le coeur à nouveau. Et en même temps... j'arrête pas de penser à lui, j'arrive pas à m'imaginer tirer un trait sur tout ça et passer à autre chose.

Même si c'était ce qu'elle avait prétendu faire jusqu'ici.  
   

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arlene ne regrettait définitivement pas de s'être confiée à Charlene. Cette dernière était capable d'une analyse et d'une empathie dont elle avait le plus grand besoin à l'heure actuelle, pour réussir à faire le tri dans ses émotions. Ce n'étaient pas ses sentiments qu'elle remettait en question, c'était tout le reste, et il fallait qu'elle y soit plus que vigilante si elle voulait éviter de s'engager à corps perdu dans une relation qui achèverait de lui briser le coeur.

Darlene avait encore du mal à savoir que faire, mais les conseils de Cherryl, déjà, lui faisaient du bien. La jeune femme n'aurait su à qui d'autre se confier à ce point directement et sans détour. Il y avait Wade, bien sûr, mais son meilleur ami était de parti pris dans toute cette histoire. C'était lui qui avait dû la ramasser à la petite cuillère quand Emmett avait disparu du jour au lendemain sans aucune explication. Il était normal qu'il garde quelques rancoeurs justifiées envers lui. Quant à Illan... elle ne se voyait même pas aborder le sujet avec lui, elle était prête à parier qu'il sortirait immédiatement de ses gonds... Et encore, il ne savait pas qu'Emmett était un sorcier, là ce serait pire que tout.

Darlene poussa un léger soupir, toute cette situation la dépassait. Elle aimait quand les choses étaient simples et allaient de soi, elle n'avait jamais eu envie de se compliquer l'existence, elle n'avait jamais recherché à se retrouver dans ce genre d'imbroglio sentimental. Et pourtant, elle en était là, à présent... Et sans les paroles pleines de sagesse de son amie, elle ne savait définitivement pas ce qu'elle ferait. Enfin, pas qu'elle le sache forcément beaucoup plus en cette seconde, mais elle était en tout cas prête à se questionner et à questionner cette relation afin de ne pas juste... faire n'importe quoi, ce qui lui ressemblait beaucoup trop par moments.

-Tu as raison. Je sais vraiment pas si je peux lui refaire confiance ou non à ce stade... et j'ai pas envie de remettre en question tous ses faits et gestes, de devenir paranoïaque, ce serait insupportable pour moi, injuste pour lui. Elle marqua une pause. Mais je pense que s'il arrive à me prouver qu'il est vraiment capable de rompre les liens pour de bon avec sa tarée de mère, j'arriverai à lui donner une seconde chance. Elle marqua une pause. C'est dingue, avant son retour, j'arrivais presque à faire comme si j'avais tourné la page, et à peine il est revenu que je me suis repris tout en pleine figure, tout ce que j'ai toujours ressenti pour lui. Y a des gens comme ça... Je crois qu'on les a dans la peau, c'est plus fort que nous. 
   

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arlene ne pouvait se confirmer à la vision qui était celle de son interlocutrice. Pas parce qu'elle tenait absolument à avoir une âme soeur (quelque part, c'était une chose plus handicapante qu'autre chose), mais parce qu'elle estimait que si les âmes soeurs existaient, ce n'était pas un choix personnel que d'y croire ou non, c'était juste une chose qui était, un point c'est tout, et le fait qu'on y croie ou non n'avait pas spécialement d'influence là-dessus. Ceci dit, elle n'était pas certaine qu'il vaille la peine de lui en parler, ou de débattre de la question.

Elle allait peut-être passer pour naïve, et elle ne le voulait pas. Elle devait surtout éviter de l'être alors qu'elle ne voulait pas sombrer dans les pièges qui avaient fait qu'elle avait fini avec le coeur brisé pour commencer. Elle n'avait pas envie de se faire du mal en se faisant avoir par des préconçus romantiques de base... Bien sûr, si Cherryl savait tout, si elle se souvenait de Jane, elle parviendrait peut-être plus facilement à la croire ou à se ranger à son opinion. Mais, évidemment, ce n'était pas le cas, et il ne fallait pas que ce soit le cas, même si tout déballer serait particulièrement tentant par moments.

-Euh oui, sûrement..., répondit-elle, remise à sa place, mais tout de même incapable de ne pas rebondir sur les propos de son interlocutrice, même si ce n'était pas forcément une bonne idée, chose qu'elle savait, bien sûr. Ca ne t'est jamais arrivé, à toi ? De te sentir à ce point proche de quelqu'un d'autre ?

Elle ne savait pas ce que serait la réponse de Cherryl. Si ça avait été le cas, elle l'avait techniquement oublié, mais peut-être pas complètement ? Peut-être lui restait-il des réminiscences de ce qu'elle avait partagé avec Jane ? Ou pas du tout. Dans tous les cas, elle avait envie que son amie se mette à sa place, ou bien soit capable de lire certaines choses entre les lignes, ces choses qu'elle n'était pas autorisée à dire, pas à elle en tout cas, mais qu'elle avait tout de même très envie de dire quoi qu'il en soit.

Ce n'était pas forcément une bonne idée que de lui poser la question, elle devrait plus certainement passer à autre chose, et elle le savait, ou en tout cas en partie. Seulement voilà, elle avait envie d'entendre sa réponse malgré tout, animée par une curiosité qu'elle ne savait pas taire.
   

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ui, c'est certain, dans la situation de Cheryl, trouver l'amour était évidemment plus compliqué que dans celle, par exemple, de Darlene. Cette dernière pouvait bien se torturer l'esprit avec Emmett et leur relation qui peut-être était destinée à échouer quoi qu'il advienne, et peu importe à quel point elle déciderait d'y croire ou non. Mais au moins, ses goûts n'allaient pas à l'encontre de la société, même si elle devait souffrir une autre forme de discrimination, pour le coup, celle que beaucoup trop de sorciers - et la mère d'Emmett, à l'évidence - entretenaient à l'encontre de ceux qu'ils appelaient les No-Majs.

Oui, la situation de Cherryl n'était pas simple, mais Darlene avait envie d'y croire malgré tout, sans doute parce que peu importe à quel point la vie pouvait décider de lui mettre des bâtons dans les roues, elle restait une grande romantique, qui ne pouvait absolument pas s'ignorer, loin de là. Darlene, au fond d'elle, espérait tout de même que Cherryl finirait par connaître, ou plutôt reconnaître (c'est le cas de dire) ce sentiment, parce qu'il était trop beau, trop fort, trop intense, pour ne pas être ressenti. C'était le genre qui vous transportait, le genre qui vous rendait heureux, le genre qui vous faisait souffrir, aussi, mais parfois, ce n'était pas forcément si mal, non ?

Darlene avait envie, diablement envie de contredire son interlocutrice quand elle affirmait qu'elle avait du mal à s'attacher. C'était peut-être le cas maintenant, et si c'était le cas, c'était que les circonstances l'avaient arrachée à la femme qu'elle aimait, et ça c'était injuste, tellement injuste... Darlene avait envie de lui répondre que quand elle serait en présence de la bonne personne, elle comprendrait, mais en même temps ,elle se doutait déjà de ce que Cherryl allait lui répondre : elle ne la croirait pas, point à la ligne. Et Darlene manquerait d'arguments pour la convaincre : trop de secrets qu'elle était contrainte de garder pour elle alors qu'elle brûlait d'envie de tout balancer, de tout lui expliquer du début à la fin, ou tout ce qu'elle savait, en tout cas, mais les choses n'étaient jamais aussi simples.

-C'est pas plus mal de prendre son temps, tu sais. Les décisions impulsives sont rarement une bonne chose, crois-moi, je suis bien placée pour en parler, répondit Darlene avec un fin sourire aux lèvres. Et puis, ça évite les mauvaises surprises ou les découvertes encombrantes. Elle marqua une pause. Je suis sûre que tu vas finir par trouver la bonne personne. Tu l'as peut-être déjà rencontrée, d'ailleurs.


   

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h, comme il serait tentant de tout lui dire ! de juste se moquer des conséquences et de tenter de réunir Jane et Cherryl ensemble, parce qu'elles était convaincue qu'elles étaient faites pour être ensemble, faites pour s'aimer. Mais par des dizaines et des dizaines d'aspects, il fallait admettre que ce serait la pire idée possible et qu'il était plus que préférable de ne pas y souscrire. Non, elle ne dirait rien, mais jamais elle ne cesserait de vouloir disséminer des indices pour pousser cette femme à retrouver celle pour qui elle était faite, pour leur permettre de se retrouver une bonne fois pour toutes.

Elle ne voyait pas qui cela pouvait être, évidemment, mais elle semblait capable d'admettre que c'était le cas malgré tout. C'était ce que Darlene gardait à l'esprit. Chaque petit pas qu'elle réussissait à faire, elle qui manquait si terriblement de subtilité, lui paraissait bon à célébrer. Pour le reste, elle avait sans doute raison de dire que même si elle ne trouvait pas, ça n'avait absolument rien de dramatique en quoi que ce soit. C'était tout à fait vrai, et ce n'était jamais dramatique pour personne, d'ailleurs, mais en indécrottable romantique, la jeune femme avait quand même un peu de mal à l'entendre de cette oreille pour sa part.

-Oui, il paraît, mais il faut aimer être seul pour commencer, pour ça. C'est ton cas ?

Elle devrait vraiment arrêter d'insister, mais c'était plus fort qu'elle. Peut-être qu'elle se montrerait moins insistante si elle ne connaissait pas de la vie de Cherryl des aspects que même cette dernière ignorait, mais en toute connaissance de cause, elle était tout à fait incapable de se taire. Alors elle parlait trop, elle était intrusive, elle était insistante, mais dans son esprit, il y avait une raison à cela, ça en valait tout à fait la peine et Cherryl ne devait pas, surtout pas, baisser les bras. Et ce quelque puisse être le prétexte.

-Si t'en parles au conditionnel, c'est que tu n'es pas totalement convaincue.... Je veux dire, je ne voudrais pas que tu te fermes pour de bon, ou bien tu pourrais passer à côté de la bonne... personne, sans même t'en rendre compte. Elle sourit. Mince, je recommence à insister. Désolée, je sus une éternelle romantique.

   

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arlene, peut-être parce qu'elle était une indécrottable romantique, était assez incapable de concevoir que l'on puisse vraiment aimer la solitude, mais d'un autre côté, si elle acceptait d'être objective, elle pouvait bien reconnaître que tout le monde était différent, et tout le monde avait son propre rapport à ses relations aux autres, elle avait son propre rapport à l'amour et à la société, en bref, il fallait accepter la différence de chacun... Oui mais tout restait relatif malgré tout. Darlene était une jeune femme romantique, et qui savait des choses que Cheryl ignorait, et elle n'arrivait pas à faire abstraction, c'est tout.

-Dire qu'on n'a pas le temps pour ça, c'est toujours une excuse, on a toujours du temps pour s'ouvrir aux autres, on a toujours du temps pour aimer. Ce qui est bien avec ce sentiment c'est qu'on peut le faire constamment, même quand on fait autre chose.

Est-ce qu'elle va passer pour niaise ou naïve ? Oui, elle se rendait bien compte de cela, mais si elle en parlait, c'est que c'était une chose qu'elle pensait, c'était une chose qu'elle avait expérimenté. Le temps, c'est comme le coeur, ce n'est pas quelque chose qui s'étire ou que l'on fragment, c'était une choser que l'on remplissait, un point c'est tout.

-Pas impossible, il suffit d'aller dans les bons endroits, fit Darlene avec un fin sourire.

Oui, c'est sûr que dans la société où elles évoluaient, trouver un partenaire, et qui plus est du même sexe, mais justement, parce que c'était difficile, il existait des lieux de rencontres secrets pour des personnes en mal de liens sociaux. Ce qui n'était pas forcément une manière de rencontrer l'amour, d'ailleurs, mais pouvait tout simplement être une manière de rencontrer des personnes qui partageaient les mêmes expériences que vous. Cela dit, la jeune femme se rendait bien compte du fait qu'elle avait déjà beaucoup trop insisté.

-Mais je ne vais plus insister, ne t'en fait pas, je voulais surtout m'assurer que tu étais heureuse. Si tu l'es, alors je le suis moi aussi.

Et si elle le disait, c'est parce que c'était la plus pure et la plus stricte vérité.

   

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