Un bon secrétaire doit être capable d'entendre sans écouter, de regarder sans voir. (Henry)

Un bon secrétaire doit être capable d'entendre sans écouter, de regarder sans voir

Les choses n’avançaient pas, c’était la sensation qu’Henry avait. Ça n’avançait pas, il n’en savait pas plus sur la mort d’Henry Jr, personne ne lui apportait de réponses, personne ne lui donnait le nom du coupable, ou des coupables. Personne ne savait rien, et c’était plus que frustrant. Il était furieux, furieux contre tout le monde. Contre le meurtrier, contre les autorités, contre lui-même, contre tous… Il n’y avait que Langdon qui affirmait avoir assisté à la scène, mais Henry ne savait pas s’il pouvait se fier à ce que lui disait son fils. Pourquoi lui aurait vu quelque chose, et tous les autres rien du tout ? Et puis, ce qu’il disait était vraiment… étrange. Une fumée noire qui aurait tout détruit et attaqué Henry Jr. Cela n’avait pas de sens, et c’était inexplicable. En tout cas, Henry ne se sentait pas plus avancé en ce qui concernait cette affaire. Il avait vraiment envie de connaître la vérité, mais personne n’était capable de la lui donner.

Et en plus de ça, il s’inquiétait pour Langdon. Son fils tenait des propos étranges, et très peu rassurants. Il ne savait pas quoi en penser. L’idée que son fils prenne des substances étranges l’avait effleuré, et continuait à le faire. Même s’il espérait que non, mais il y avait aussi cette famille étrange avec qui Langdon était souvent fourré. Les Barebone… Henry ne les appréciait pas, ils étaient bizarres. En plus, il paraît que le fils avait disparu, ou était mort. C’était triste, mais avec ce qu’ils racontaient, pas étonnant qu’ils aient des ennemis, même si les attentats avaient fait pas mal de dégâts, et donc que pour une fois, les Barebone n’étaient pas vraiment responsables. Mais bon, il n’avait pas très envie de penser à tout ça pour le moment, même si la mort de son fils l’obsédait, il voulait réussir à travailler, et il refusait de laisser son entreprise de côté. Il avait tant donné pour arriver là où il était, il ne pouvait pas baisser les bras maintenant. Henry Jr ne l’aurait pas accepté, il en était certain. Il laissa la personne qui venait de frapper à la porte entré, avant de découvrir qu’il s’agissait d’Isobel, sa secrétaire. Une jeune femme qu’Henry appréciait, elle travaillait très bien en plus de cela.

« J'ai les documents que vous m'avez demandé Mr. Shaw. »

Il la regarda déposer les documents sur son bureau, d’un air un peu absent. Il ne se souvenait même plus de ce que c’était. Le souci et la fatigue avaient de mauvais effets sur lui, mais il fallait qu’il se reprenne, qu’il arrive à surmonter tout ça. Mais ce serait plus simple si il avait un coupable pour le meurtre de son fils.

« Est ce que vous avez besoin de quelque chose ? »

Henry secoua légèrement la tête pour se reprendre puis il réfléchit, à s’il avait une tâche à confier à Isobel. Il pensait qu’il pouvait lui faire confiance. Et il l’appréciait. C’était une jeune femme de bonne famille, très bien éduquée, qui travaillait très bien. Le genre de femme qu’il aimerait voir dans l’entourage de Langdon, mais son fils ne semblait guère s’intéresser à la gente féminine avec ses histoires de sorcières.

« Merci miss Sandford. Que pensez-vous des récentes attaques qui sont survenues le soir du réveillon de la nouvelle année ? »

Il ne savait pas vraiment pourquoi il lui posait cette question, sûrement de la curiosité.

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Henry avait l’impression d’avoir vingt années de plus ces derniers temps. Il venait tous les jours au travail. Premier arrivé, et dernier parti comme toujours. Mais il n’avançait presque pas, ou très lentement. Il était fatigué, et abattu. Sa femme et ses fils lui manquaient, et il n’avait rien, à part son journal pour compenser cela. Néanmoins, il refusait de baisser les bras, et de se laisser aller. Il avait encore des choses à accomplir, il le savait. Il savait aussi que son épouse et Henry Jr ne voudraient pas le voir dépérir. Quant à Langdon, ce dernier ne semblait pas du tout intéressé par le sort de son père. Combien même pourrait-il décéder le lendemain que cela ne le toucherait probablement pas, peut-être même qu’il ne prendrait pas la peine de se rendre à ses obsèques. Ses pensées étaient bien macabres, mais en même temps, la moitié de sa famille était morte.

Mais ce n’est pas pour autant qu’il voulait faire subir son humeur morbide aux autres, et en particulier à Isobel. Sa jeune secrétaire qui était tout à fait charmante, et qui remplissait son rôle avec succès. Elle ne méritait pas d’avoir un patron dépressif, et il ne voulait pas l’être dans tous les cas, en aucun cas. Il voulait rester performant, il voulait rester Henry Shaw, et il faisait tout pour que le journal reste au sommet de sa gloire. Heureusement, ses équipes étaient performantes et savaient aussi se débrouiller sans qu’il ne soit derrière eux. Ce serait impossible dans tous les cas. Quoiqu’il en soit, il avait envie de parler à quelqu’un. Pas de lui forcément, mais de tout ce qu’il se passait à New York ces temps-ci. Pour le journal, cela faisait des sujets à couvrir, mais il y avait aussi des vies en jeu.

« Vous voulez dire ce qui est arrivé à l’église de la famille Barebone ? »

Henry hocha la tête. Il comprenait qu’elle puisse se montrer surprise. Il lui sortait cela comme ça, sans préavis. Ce n’était pas vraiment attendu. Mais Henry discutait plus ou moins souvent avec Isobel, de tout et de rien. Il appréciait la jeune femme, et c’était toujours appréciable de pouvoir converser de manière un peu plus détendue. Même si là, le sujet n’avait rien d’agréable.

« Est-ce que vous me demandez cela à cause de votre fils ? »

Son fils… Henry n’avait plus l’impression d’avoir de fils. L’un était mort, l’autre ne voulait plus lui parler. Il s’était mortellement inquiéter le soir du réveillon. Heureusement, ses sources lui avaient confirmés que Langdon était sain et sauf. Peut-être que l’attaque le dissuaderait de traîner avec ces gens, mais connaissant son fils et son esprit buté, il en doutait très sincèrement. Ce qui était bien dommage, il fallait vraiment qu’il finisse par se reprendre.

« Je voudrai seulement avoir votre avis. Cette famille, les Barebone, ils sont vraiment dérangés. Mais c’est bien triste que ce garçon soit mort… ce n’est pas de sa faute si sa mère est folle alliée. »

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Henry ne savait pas vraiment pourquoi il parlait de tout cela avec Isobel. Certes elle était sa secrétaire, mais ce n’est pas pour autant qu’ils étaient vraiment proches et partageaient beaucoup sur leur vie privée. Pourtant, Henry appréciait discuter avec la jeune femme, elle était intéressante et bien éduquée, donc leurs conversations pouvaient se révéler être assez agréables au bout du compte. Mais bon, c’était un sujet de conversation qui lui était venu comme ça, impulsivement. Il ne savait pas ce qu’il attendait comme réponse de la part de la jeune femme, mais il ne pouvait pas affirmer que Mary Lou Barebone n’avait pas créer une mini tornade dans sa vie. Elle lui avait pris Langdon, l’avait embobiné et profité de son état de faiblesse psychologique. Il n’en démordrait pas, et elle répondrait de ses actes, tôt ou tard. Langdon avait beau avoir coupé les ponts avec lui, ce n’est pas pour autant qu’il laisserait totalement tomber son fils. Henry Shaw était un homme qui avait un très gros égo, mais il avait déjà perdu un fils, et même si ses relations avaient toujours été plus ou moins compliquées avec Langdon, il refusait de laisser son fils se perdre totalement.

Et puis, au-delà de ça, Henry n’était pas contre un peu de socialisation. Il n’avait plus envie de parler aux médias, même s’il représentait la plus grosse partie des médias, et il n’avait pas envie de batailler encore avec les autorités pour avoir de vraies réponses à ses questions. Une petite discussion l’aiderait peut-être à se changer un peu les idées, peu importe le sujet. Même s’il avait lancé lui-même le sujet sur les Barebone et leur secte, ce qui en soit, était lié à ses soucis, du moins une partie de ses soucis. Il était bien loin d’imaginer que le fils Barebone soit le meurtrier. Et encore plus loin d’imaginer que les discours de sa mère adoptive n’étaient pas qu’un tissu de mensonges.

« Vous pensez réellement qu’elle est folle alliée ? Je dois bien avouer que je ne sais pas réellement quoi penser de tout cela. Je trouve qu’ils ne méritaient pas forcément ce qu’ils ont vécus, ce pauvre jeune homme ne méritait pas de périr. Mais je ne sais quoi penser de Madame Barebone. Elle m’a semblé bien aimable quand elle est venue avec votre fils vous rendez visite, mais son discourt est… étrange. »

Henry devait bien avouer qu’il se trouvait assez… surpris de la réponse de la jeune femme. Il ne s’attendait pas à cela. Elle avait le droit d’avoir son opinion évidemment, mais il ne la partageait pas. Sauf sur le fait que le garçon avait connu un bien triste sort, évidemment. Si sa mère était folle, il n’en était en aucun cas responsable. Mais ce genre d’incident leur pendait tout de même au nez, avec tout ce qu’elle pouvait répandre comme idée. C’était avec ce genre de procédé que l’on faisait naître et monter la psychose.

« Que pourrait-elle être d’autre ? Enfin, vous avez raison. Elle est plus fourbe que cela, elle embobine ces gens pour leur soutirer des choses, pour avoir une emprise sur eux. Ne vous laissez pas berner mademoiselle, Mary Lou Barebone n’a rien d’une femme aimable, vous pouvez me croire. Et je ne la laisserai pas me prendre Langdon, même si à l’heure actuelle, je ne sais que faire pour la contrer. Elle l’a totalement sous sa coupe, et il refuse tout contact avec moi. »

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Henry n’avait aucune envie qu’Isobel finisse par se faire embobiner, elle aussi. Cette Mary Lou Barebone devenait bien trop néfaste pour la ville de New York, et ses clowneries avaient bien assez duré comme ça. Henry refusait que cela ne continue. Peut-être que si Langdon n’avait pas été entraîné dans cette secte, Henry ne s’en serait pas intéressé plus que ça. Mais là… non, c’était trop. Il ne pouvait plus la supporter, et il ne pouvait plus supporter ceux qui suivaient, comme des moutons, alors qu’elle leur racontait n’importe quoi. Et en plus, elle avait espéré de l’argent de sa part… n’importe quoi. Mais au moins, il savait pourquoi elle s’était attaquée à Langdon.

Manque de chance, cela n’avait pas fonctionné, mais elle avait eu Langdon, et Henry ne pouvait pas laisser son fils dans cette situation. Même si ce dernier refusait de le voir, et de lui parler, Henry devait faire quelque chose pour sauver son fils de cet enfer. C’était vraiment dur pour lui, de voir Langdon agir de la sorte, être convaincu de la sorcellerie, convaincu que son frère avait été tué par un sorcier… Henry ne pouvait pas y croire, c’était tout bonnement impossible. Il était très cartésien, et jamais il ne pourrait croire à la magie. Même si on la lui mettait sous le nez, il aurait des doutes. Et dans tous les cas, personne n’avait jamais pu prouver quoique ce soit, comme pour els fantôme, ou les gens venus d’autres planètes… c’était des foutaises tout cela, et il n’avait pas de temps à perdre avec, tout simplement.

Enfin bref, Isobel était une gentille fille, et Henry l’appréciait beaucoup en tant que secrétaire, mais il ne voudrait pas qu’elle se fasse avoir. Elle était aussi naïve que délicate, et il n’avait pas envie que Mary Lou réussisse à exercer également une pression sur elle, jamais de la vie. Henry avait toujours un instinct un peu paternel avec Isobel. Après tout, elle avait l’âge de Langdon presque, alors elle aurait pu être sa fille. Il l’avait toujours considérée avec bienveillance, et il serait vraiment touché, s’il lui arrivait quelque chose par malheur.

« Qu’est-ce que vous allez faire du coup ? »

Bonne question. Henry ne savait pas encore comme il allait procéder, mais si Mary Lou Barebone voulait la guerre, elle allait l’avoir, aucun doute là-dessus. Henry n’avait pas envie de la laisser gagner, ou qu’elle pense avoir gagné. Ce n’était pas le cas, pas du tout. Il pourrait se montrer compréhensif, parce qu’elle avait elle aussi perdu un fils récemment, mais il n’était même pas sûr qu’elle en soit peinée. Cette n’avait pas de cœur, cela se lisait sur son visage. On pouvait dire de lui qu’il était un cœur de pierre, mais ce n’était que la surface, la réalité était toute autre.

« Je ne sais pas encore. Pas exactement. Mais si cette femme veut la guerre, Mademoiselle Sanford, je suis en mesure de la lui donner. »

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Henry était un battant, il l’avait toujours été. S’il avait réussi à se constituer un tel empire, ce n’était pas en se tournant les pouces, ou en craignant de froisser les autres. Henry s’était toujours imposé, il avait travaillé dur, et il était vraiment fier d’où il en était à ce jour. Il n’avait cependant jamais relâché ses efforts, encore aujourd’hui, il aimait diriger sa société, et continuer de la faire prospéré. Il avait toujours pensé que l’un de ses fils reprendrait le flambeau. Henry Jr avait voué sa carrière à la politique, mais Langdon avait choisi le journalisme, même si à cette heure, Henry ne lui lèguerait rien du tout.

Quoiqu’il en soit, ce n’était pas Mary Lou Barebone qui allait lui faire peur. Il était sérieux dans ce qu’il disait à Isobel, si cette femme désirait vraiment la guerre, il était en mesure de la lui donner. Et il avait assez d’argent et de pouvoir pour lui faire regretter de s’en être pris à sa famille. Il ne démordait pas qu’elle avait totalement embobiner son fils, en plus d’avoir tenté d’extorquer de l’argent sa famille. Il ne savait pas du tout si Langdon lui avait donné de l’argent, mais pas un seul autre dollar venant de son compte en banque ne viendrait renflouer les poches de cette sorcière.

« Je n’en doute pas une seule seconde. »

Sa réponse ne l’étonnait pas, Isobel n’aurait pas eu intérêt à le contredire. Henry n’avait jamais été mécontent du travail de la jeune femme, elle était une très bonne assistante, et elle avait toujours fait tout ce qu’il lui avait demandé. Qu’elle le pense ou pas, ce n’était pas très important au final. Il savait de quoi il était capable, et il savait que Barebone n’avait pas vraiment de moyens. Elle détenait Langdon, mais il était trop précieux pour qu’elle lui fasse plus de mal qu’elle n’en avait déjà fait.

« Sauf votre respect Monsieur Shaw, je ne veux pas dépasser les limites mais… Il faut que vous preniez soin de vous monsieur. Si vous avez besoin de vous reposer… »

Là par contre, il était un peu surpris par sa réflexion. Il ne s’attendait pas à ce cela. Il n’était pas forcément vexé, connaissant la jeune femme, il se doutait qu’elle ne pensait pas à mal, et qu’elle proposait cette option parce qu’elle était inquiète pour lui. Il était reconnaissant de sa sollicitude, mais il s’interrogeait sur la raison de cette proposition. Est-ce qu’il donnait l’impression qu’il avait besoin de repos ? Henry se faisait vieux, c’est sûr, mais il n’avait pas l’impression d’être en si mauvais état.

« Vous pensez que j’ai besoin de repos mademoiselle Sandford ? »

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Henry n’était pas en colère contre Isobel. Il voulait juste qu’elle se sente libre de s’exprimer clairement, sans craindre de répercussions. Il savait qu’il pouvait se montrer impressionnant, et qu’il était capable de coups de sang assez terrifiants. Mais il n’était pas fâché par le fait qu’elle émette qu’il puisse avoir l’air fatigué. En soit, Henry ne se sentait pas en grande forme, mais il ne voulait pas sombrer. Comme si cela ne pourrait qu’empirer, s’il décidait de s’arrêter, de prendre un peu de repos. Il ne voulait pas perdre de son joug, et de sa combattivité, il refusait de s’avouer vaincu. C’était tout bonnement hors de question.

« Je pense simplement que… après tout ce que vous avez vécu, il serait normal que vous preniez soin de vous. »

Prendre soin de lui… il ne pensait pas non plus se laisser aller. Mais il pensait voir où Isobel voulait en venir. Cela n’était pas totalement faux. Il est vrai qu’il forçait peut-être un peu ces derniers temps, mais il n’avait pas envie de lever le pied. Il n’avait aps envie de se retrouver seul avec lui-même. De se rendre compte de tout ce qu’il avait perdu, de ce qui lui restait. Presque rien. Henry était seul. Seul avec son empire médiatique. Sa femme et son fils aînés étaient morts, Langdon ne voulait plus lui parler. Il n’avait plus grand-chose si ce n’est son travail, et il était normal qu’il s’y accroche.

« Je sais que vous avez suffisamment de forte pour… supporter tout ça. Mais je ne voudrais pas que vous vous mettiez trop de côté non plus. »

Il entendait ce qu’elle lui disait. Mais il ne savait pas comment il pourrait ne pas se mettre de côté. Henry n’avait pas grand-chose à faire, quand il rentrait chez lui. Il était seul, et il n’avait envie de rien. Il ne voulait pas se trouver de nouveaux hobbys, avoir des amis, faire des sorties… il avait le sentiment de n’avoir plus goût à rien, si ce n’est au travail. Ce n’était sûrement pas ce qu’il fallait faire, mais peu importe. Il faisait comme il pouvait. Ce n’était pas comme s’il y avait une vraie méthode à suivre dans tous les cas.

« Je te remercie de ton inquiétude, cela me touche. Mais je n’ai pas de vraies raisons de prendre soin de moi tu sais. »

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