Dans l'antre de la Perdition et de la Magie [pv. Langdon Shaw]

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angdon avait bien cru faire une syncope quand, de retour dans son appartement à l'état plus que misérable puisqu'il ne prenait plus le soin de l'entretenir depuis plusieurs longues semaines, il avait entendu toquer à la fenêtre le bec déterminé d'un oiseau noir. Dans un premier temps, il fut décidé à fermer les rideaux et à attendre que l'animal parte, mais il constata vite que le corbeau n'avait pas un comportement tout à fait normal (pas qu'il soit un expert en matière de comportement du corbeau, mais...), et surtout, il avait quelque chose d'attaché à la patte.

Avec une immense réticente, le jeune homme avait ouvert et l'oiseau était resté sur le rebord de sa fenêtre, la patte tendue. Hésitant, Langdon récupéra le message. C'était pile dans des moments comme celui-là qu'il voudrait qu'il y ait des témoins, quelqu'un pour constater qu'il n'hallucinait pas, autant pour enfin convaincre les autres que pour se convaincre lui-même, résolument épuisé de se battre contre des moulins à vent. Sitôt le courrier récupéré, l'oiseau repartit sans demander son reste. Le coeur battant, Langdon lut la missive. Brève, concise, mais le jeune homme n'eut aucun mal à savoir de quoi il retournait.

Il avait beaucoup réfléchi depuis sa dernière conversation avec Phineas, et il pensait avoir trouvé une garantie susceptible de le convaincre, et susceptible, de lui faire mettre, à lui, un plein pied dans le monde de la magie... quitte à y perdre quelques plumes. C'était trop important, il n'était que trop nécessaire pour lui de mettre des mots sur ce qu'il ne comprenait pas encore. Il n'avait pas le choix, en somme. Il fallait vraiment qu'il aille jusqu'au bout, et ce Phineas était peut-être sa voie d'entrée royale vers un monde dont il ne devinait que les contours... C'était comme se tenir à distance d'un paysage encore trop flou...

Il se rendit à l'heure donné (autant dire plus ou moins tout de suite, puisque le rendez-vous était trois heures plus tard) par son mystérieux guide, à l'adresse qu'il lui avait indiquée. Une ruelle qui ne payait pas franchement de mine. Un traquenard ? Langdon n'était en tout cas pas à l'aise du tout. Les mains enfoncées dans les poches de son manteau, il tentait du mieux qu'il le pouvait de garder une certaine contenance. Sur place, il constata que Phineas était déjà là. C'était un bon début.

-Bonjour Phineas, le salua-t-il.

Il n'ajouta rien d'autre. Il était trop nerveux pour faire la conversation. Il attendait de son interlocuteur qu'il prenne les rênes. En espérant ne pas regretter d'être venu.

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h ça, pour l'avoir trouvé, le message l'avait en effet bel et bien trouvé, mais Langdon allait s'épargner tout commentaire sur le mode de communication choisi par son interlocuteur. De toute évidence, il y avait beaucoup de choses à en dire, et au final, il espérait bien finir par tout savoir de ce que recelait le monde auquel - Langdon n'avait plus que des certitudes à ce sujet, raison pour laquelle il conserverait forcément et par principe une certaine défiance à l'adresse de son interlocuteur - son interlocuteur appartenait. Mais chaque chose en son temps, il savait pertinemment que s'il ne procédait pas par étape, il n'allait pas être au bout de ses peines.

Malgré ses réticences, le jeune homme accepta la main que lui tendit Phineas et la serra. Il réalisait bien qu'il prenait des risques inconséquents à l'heure actuelle. Il était loin de s'être départi de sa vision très manichéenne des choses et les sorciers restaient pour lui une menace des plus sérieuses, pourtant, il acceptait un tête-à-tête avec un sorcier à présent avéré, et il n'avait prévenu par ailleurs personne de cette rencontre (en même temps, à qui aurait-il pu en parler ? Comme d'habitude, on l'aurait pris pour un fou, et Mrs Barebone aurait forcément tenu à l'accompagner, chose que Langdon ne voulait pas). Il se disait qu'il n'avait plus grand chose à perdre. Mais il espérait quand même ressortir en un seul morceau de cette entrevue et ne pas terminer comme son frère. Il n'était pas franchement certain que ce soit gagné.

-Non ça va, vos indications étaient précises, répondit Langdon quand son interlocuteur lui demanda s'il avait eu du mal à trouver le lieu de leur rendez-vous.

Langdon connaissait bien assez New York, lui qui y était né et y avait presque toujours vécu, pour ne pas se perdre dans le dédale de ces rues, malgré tout, il n'avait pas souvenir de s'être égaré par ici. Il faut dire qu'à première vue, cet endroit ne laissait pas soupçonner quoi que ce soit d'intéressant ou de particulier, ce qui laissait Langdon sur cette interrogation : pourquoi son interlocuteur avait-il fait le curieux choix de lui donner rendez-vous ici ?

-Même si j'admets ne pas vraiment comprendre ce que nous faisons là...

Langdon laissait à son interlocuteur les rênes de la situation, il n'avait pas vraiment le choix au demeurant, mais cela ne l'aidait pas franchement à aborder la situation de la manière la plus détendue qui soit.

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angdon hocha nerveusement la tête tandis qu'il prenait pleinement conscience de ce qui allait arriver. Il s'était douté, bien sûr, du fait que Phineas n'avait pas choisi ce lieu de rendez-vous de façon anodine et aléatoire, qu'il allait... passer de l'autre côté du miroir. Ce n'est pas pour autant qu'il savait plus que cela à quoi s'attendre. A quoi ressemblait un endroit réservé aux sorciers, exactement ? Pétri de préjugés, il ne pouvait s'empêcher de s'imaginer une armée de chapeaux pointus et de chats noirs, et quelques sacrifices humains à la clé...

Et s'il n'était jamais qu'une offrande un peu trop consentant à il ne savait quelle divinité sorcière ? ... Non, définitivement, il devait attendre de voir au lieu d'élaborer en esprit tous les pires scénarios possibles, cela, clairement, ne le mènerait nulle part. Prendre sur lui et ne pas avoir l'air surpris, donc.... Il ferait du mieux qu'il le pourrait - pour sa propre sécurité, comprenait-il - mais il n'était pas sûr de pouvoir faire de miracles non plus s'il devait s'exposer à quelque chose qui réellement dépassait l'entendement pour lui.

Et il comprit vite que c'était mal parti quand, après avoir suivi Phineas dans une étroite impasse, il vit l'affiche publicitaire bouger tout à coup, comme prenant vie. D'accord, d'accord... Il devait vraiment se convaincre qu'il n'était pas en pleine hallucination. Et pourtant, il savait pertinemment que ce n'était qu'un début. On les fit entrer, et le premier sentiment qu'eut Langdon était que, étonnamment, des bars clandestins du genre, de ceux que son frère avait si obstinément voulu faire fermer de son vivant de sénateur, il y en avait foule chez les non-sorciers aussi pour qui savait chercher. Mais il ne lui fallut tout de même pas longtemps pour constater que l'ambiance y était... vraiment très différente.

Le tintement du verre, la fumée de cigarette. Une voix... Langdon faillit faire une nouvelle syncope en constatant combien la chanteuse que certains clients observaient avec une attention presque lubrique n'avait rien d'humaine... Il ne saurait décrire même ce qu'elle pouvait être : il n'avait jamais rien vu de tel. Au mur, des avis de recherches placardés, et des visages animés sur chaque affichette. C'était beaucoup d'informations d'un coup, et Langdon sentait les battements de son coeur s'emballer. La sensation de danger était prégnante, terrible, et en même temps... il se sentait heureux. Tout était si réel, si concret. Une bonne fois pour toutes, il n'était pas fou.

-Je ne sais pas... je ne reconnais pas la moitié des boissons, observa Langdon en plissant les yeux pour déchiffrer la liste des boissons proposés par le bar, rédigée sur une ardoise derrière le comptoir. Un whisky pur-feu, j'imagine. Ca ressemblait au moins à quelque chose qu'il connaissait, même si se laisser empoisonner était sans doute une très mauvaise idée. Si cet endroit est parmi les plus mal famés de votre monde, pourquoi me conduire ici ? Je pensais que vous comptiez me démontrer que les sorciers n'étaient pas tous des individus malveillants.

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angdon commençait déjà à regretter son choix de boisson... en même temps, vu le nom, il pouvait se douter. Et au final, ce n'était pas si mal qu'il s'accorde un remontant susceptible de l'aider à encaisser tout ce qu'il s'apprêtait à découvrir. Fort heureusement, le jeune homme n'avait jamais envisagé de noyer ses problèmes dans l'alcool (sans quoi il serait alcoolique depuis un petit bout de temps), mais ce n'est pas pour autant qu'il en admettait les bienfaits immédiats dans certaines circonstances... Quoique... il avait quand même envie de conserver un minimum de lucidité. S'il étouffait ses découvertes dans des vapeurs de whisky pur-feu, il serait capable de croire avoir halluciné une partie de ce qu'il découvrait et avait encore à découvrir.

Le jeune homme ne savait pas s'il devait être rassuré par les explications de son interlocuteur alors que celui-ci affirmait qu'ici, personne n'oserait souligner combien ses yeux étaient écarquillés. Soit... il ne savait pas vraiment ce qu'il devait en déduire, si ce n'est qu'il devait apprendre à mieux dissimuler sa surprise. Malheureusement, c'était loin d'être un exercice évident pour lui. Le jeune homme n'avait jamais été bon acteur, et où qu'il tourne son regard, il découvrait une nouvelle chose plus improbable que la précédente. Il avait un milliard de questions, mais il était difficile de savoir par quoi commencer tant tout ceci dépassait l'entendement. Il ne comprenait pas davantage pourquoi son interlocuteur voulait à ce point lui faire découvrir son monde, mais il avait tant attendu une telle invitation, peu importe les conséquences qu'il lui faudrait endurer, qu'il ne voulait pas remettre en question sa décision.

-Je... j'ai un milliard de questions, reconnut-il après un moment d'observation silencieuse, tout en dégageant au passage sa main pour la poser sur ses genoux.

Il devinait que le geste de son interlocuteur était bienveillant, et il commençait à croire qu'il ne lui voulait effectivement pas de mal, mais il restait sur ses gardes, malgré tout. Dernièrement, Langdon se méfiait de tout et de tout le monde, c'était plus fort que lui. Et ce n'était pas vraiment le cadre où ils se trouvaient actuellement qui allait l'inciter à un comportement différent.

-Je ne sais même pas par quoi commencer. Il laissa passer un nouveau temps de silence. Est-ce que vous pourriez me parler de vous ? de votre histoire ? Je crois que ce serait un début...

Ne serait-ce que pour lever le voile sur tout ce qu'il ne savait pas encore de cet homme qu'il avait malgré tout accepté de suivre à ses risques et périls.

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ien que ça, oui. En temps normal, déjà, le naturel curieux de l'étudiant en journalisme le poussait à s'interroger constamment (ce n'était sans doute pas pour rien s'il avait fini par vouloir fourrer son nez dans le monde de la sorcellerie, même si personne ou presque ne tenait franchement à l'y convier), mais dans ces circonstances, n'en parlons pas. Et encore, ce n'était qu'un début. Il était assez convaincu du fait que, pour chaque réponse que lui donnerait son interlocuteur, viendrait une salve supplémentaires de questionnements pour se joindre à la danse. Et ça avait de bonnes chances d'être sans fin.

Il revint sur sa garantie. Ah oui, la fameuse garantie. Au fond, Langdon pourrait affirmer en avoir vu assez, et puisqu'il avait eu sa preuve tangible, il n'avait plus besoin des lumières de son interlocuteur, mais non seulement c'était faux, mais en plus, il n'était vraiment pas convaincu de savoir se tirer de cet endroit indemne. Sans compter que quand bien même on déciderait de le laisser sortir de là, il était sûr et certain que rien ne se passerait s'il devait passer devant cette affiche publicitaire qui ne s'était sans doute animée que parce qu'elle avait reconnu la présence de son interlocuteur, la présence d'un sorcier.

Parler de sa vie, se confier sur lui-même, voilà aussi qui devrait établir entre eux le climat de confiance que Phineas cherchait à instaurer. En somme, c'était donnant-donnant. Ce n'était pas la part la plus délicate pour Langdon, cela dit. Après tout, le jeune homme, sans aimer vraiment parler de lui-même, n'avait pas grand-chose à cacher pour autant. On pourrait plutôt d'ailleurs lui reprocher de ne pas savoir se taire, ce qui arrivait bien souvent.

-Ma vie vous semblera sans doute bien peu palpitante, répondit Langdon, qui s'imaginait que la vie d'un sorcier, quelle qu'elle soit, devait forcément être aux antipodes de la sienne. Comme vous le savez déjà, mon père est un homme important... Et je me rends compte que je ne peux pas parler de moi sans parler presque que de lui. J'ai passé ma vie à essayer de lui plaire, enfin presque toute ma vie. Après la mort de ma mère, il n'y a plus eu que mon père, mon frère et moi, et Henry... a toujours été un cran au-dessus de moi : plus intéressant, plus investi, plus intelligent. Quand il s'est engagé dans sa carrière de sénateur, mon père a été à cent pour cent derrière lui, et là, j'ai eu l'impression que je n'existais plus du tout. Il marqua une pause. J'ai compris que les sorciers existaient avant ce qui est arrivé à mon frère, je l'ai compris grâce à Mrs Barebone, et le reste, l'agression... c'était... une confirmation violente de ce que j'avais compris. Et je me dis souvent que s'ils m'avaient écouté, on n'en serait pas là aujourd'hui. Maintenant, mon frère est mort, j'ai coupé les ponts avec mon père et Mrs Barebone est... n'est pas celle que je croyais. Il marqua un temps de pause. Ma garantie : tout ce qui se passe parmi les fidèles de Salem, je peux vous l'apprendre, dans le détail. Je ne dois plus rien à cette femme.

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entendre la réponse de son interlocuteur, Langdon s'en voulait un peu d'en avoir tant dit à son propre sujet d'entrée de jeu. Certes, il n'avait sans doute rien appris à son interlocuteur qu'il ne sache déjà, ce qui justifiait sans doute qu'il ne rebondisse sur aucun de ses propos, mais cela lui avait tout de même demandé de prendre sur lui, et il s'était livré sincèrement. Mais ces confessions ne valaient sans doute plus grand-chose compte tenue du fait que la garantie qu'il proposait à son interlocuteur ne lui convenait pas. Et quoi alors ? Langdon ne possédait plus rien, même son amour propre semblait s'être fait la malle...

-Je pensais qu'elle était sincèrement altruiste, qu'elle se souciait des enfants dont elle s'occupait, je pensais vraiment qu'elle avait une éthique, une morale. Qu'elle voulait façonner un monde meilleur, répondit sincèrement Langdon. Je ne pensais pas qu'elle était le genre de femme qui serait capable de lever la main sur ses propres enfants.

Et il avait sans doute été naïf de ne pas être capable de voir derrière le masque, mais ça avait été le cas. Il avait cru cette femme douce, sincèrement émue par le sort de ceux qu'elle proposait d'aider. Oui, elle était parfois ferme et sévère, mais c'était un mal nécessaire quand on voulait diriger un organisme efficace, pas vrai ? Sauf que le mal qu'elle faisait subir aux autres, lui, n'avait rien de nécessaire.

-C'est au-delà du fait de ne pas répondre à mes attentes. Je ne peux pas cautionner des actions qui me paraissent cruelles et inhumaines. Et je veux protéger ses filles... En ce qui me concerne, j'estime que c'est elle qui m'a trahi la première. Mais si ces explications ne convenaient pas à son interlocuteur, que se passerait-il ? Langdon était bien loin de ne jamais envisager de trahir cet homme. Et pour cause, il ne savait toujours rien de lui. Si vous deviez vous révéler être à votre tour à ce point cruel, alors oui, je n'hésiterais pas à vous trahir, je ne vois aucune raison d'en rougir.

En revanche, il voyait un milliard de raisons de se la fermer. Il parlait trop, et il se mettait peut-être bêtement en danger. C'était suicidaire de s'exprimer ainsi... cela dit, c'était tout aussi suicidaire de l'accompagner dans ce bar sorcier clandestin. Au fond, c'était son bien maigre avantage en ces circonstances : puisqu'il n'avait plus rien à perdre, il se fichait d'à peu près tout.

-Désolé, je n'ai pas de meilleure garantie, je n'arrive pas à comprendre ce que vous attendez de moi. Alors il vaudrait peut-être mieux que je m'en aille.

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angdon s'attendait à ce que Phineas lui confirme que, faute de garantie, il était temps pour lui de s'en aller. Ou pire, qu'il s'arrange pour qu'il n'aille nulle part et qu'il regrette définitivement de l'avoir suivi pour commencer, mais finalement, cela n'avait pas l'air d'être son intention. Lui non plus n'aimait pas beaucoup Mrs Barebone. En même temps, elle était dans le collimateur des sorciers, et s'ils ne la considéraient peut-être pas complètement comme une menace, ils devaient tout de même l'avoir à l'oeil.

C'était la seule chose qui pouvait justifier aux yeux du jeune homme la destruction mystérieuse de leur église et la disparition de Credence. Quant à Chastity et Modesty... Oui, elles n'avaient pas d'autre choix que de rester, parce qu'on ne leur laissait aucun autre choix, mais c'était une chose que Langdon comptait bien changer. D'une manière ou d'une autre, il saurait alerter les personnes compétentes des maltraitances subies par ces deux jeunes filles, et elles seraient placées en sécurité. Il ne comptait pas, en tout cas, laisser faire les circonstances. Il l'avait fait trop longtemps, au prix des pires conséquences. Il était temps d'y changer immédiatement quelque chose.

Quand Phineas reprit la parole, ce fut pour lui parler plus longuement. Apparemment, il acceptait le pas que Langdon avait vers lui, et il daignait en faire un autre en retour. Il lui parla donc plus largement de la manière dont les sorciers se divisaient en fonction de la "pureté" de leur sang, que des castes sociales se créaient en fonction, que ceux qui n'avaient pas de pouvoir magique étaient méprisés par ceux qui voulaient conserver la pureté du sang. Au fond, oui, ce n'était pas si différent au sein de la communauté non magique où les richesses et d'autres critères sociaux (notamment la couleur de peau) hiérarchisait les individus.

-Oui, au fond, je suppose que nos mondes fonctionnent sur des mécaniques assez similaires.

Et si on poursuivait la comparaison, il appartenait techniquement à une de ces familles sombres. Il avait grandi dans la richesse et l'opulence la plus totale, il avait largement bénéficié de ses privilège... ça ne l'avait certes pas vraiment rendu heureux, mais il n'avait jamais cherché à renverser le système, et avant de décider de couper les ponts avec son père, il n'aurait jamais envisagé non plus de renoncer à ses privilèges.

-Est-ce que vous savez lesquels de ces sorciers - de sang pur, si je comprends bien - s'en est pris à mon frère ?

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angdon sentit une vague d'espoir le traverser en entendant la réponse de son interlocuteur. Il ne s'attendait pas à une réponse à ce point catégorique de la part de Phineas, et pourtant. Ce n'est pas seulement qu'il savait quelle sorte de sorcier s'en était pris à son frère, il semblait savoir, vraiment, qui s'en était pris à lui plus concrètement... même si cette situation révélait donc de nouveaux éléments encore plus complexes à assimiler pour le jeune étudiant en journalisme que ne l'avaient été les précédents.

Une personne qui aurait eu de la magie en elle sans qu'elle ne se révèle jamais, jusqu'à ce que cette magie prenne une forme à part entière, capable d'attaquer, capable de faire du mal... c'était... difficile à concevoir, mais l'illustration s'imposait assez naturellement dans l'esprit de Langdon... Ce n'était pas un humain qui avait attaqué son frère cette nuit-là.... ou du moins, cette chose n'avait pas eu apparence humaine. Une forme sombre, massive, épaisse, dissolue, qui l'avait projeté de les airs, qui lui avait lacéré les chairs... à la pensée de ce spectacle morbide, Langdon se sentit frissonner légèrement.

Langdon était perplexe. Il devrait se garder de croire sur parole les propos de Phineas, mais en même temps... Ils se justifiaient par bien des aspects. Se pouvait-il donc qu'un seul individu, qu'une seule entité soit à l'origine de tous les sombres événements que le jeune homme avait voulu jusqu'alors imputer à toute une communauté. Et dans ce cas, quelle responsabilité devait-on imposer à l'hôte ? Ou au parasite...

-Donc tout ça, ce serait l'oeuvre d'un seul individu... Il baissa les yeux sur la table, tandis qu'il réfléchissait. J'ai le sentiment que... quand il s'en est pris à mon frère, ou aux Barebone... c'était pas aléatoire, c'était une attaque ciblée. Mais le seul point commun entre ces deux événements, c'est... moi.

Ce qui n'était pas faux. C'était lui qui avait fait entrer sans le savoir le loup dans la bergerie en présentant les Barebone, et donc Credence, à son père et à son frère... Il ne faisait pas encore complètement le lien, mais il commençait à se demander si l'identité de cet... obscurial ne lui serait pas familière.

-Vous dites que vous pensez connaître le nom du porteur...

Il avait besoin d'entendre ce nom... Peut-être que tout deviendrait plus clair, alors.

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trangement, et même si l'information restait difficile à assimiler pour Langdon, elle lui semblait plus simple à appréhender en estimant que le décès de son frère et l'attaque des Barebone avaient été orchestré non pas par tout un groupe d'individus qui voulaient à tout prix la mort des siens, mais par une seule personne. Même si la menace restait surnaturelle, elle en devenait quelque part plus... tangible... Et Langdon, pour cette raison, avait plus de facilités à croire son interlocuteur sur parole. Bien sûr, il devrait continuer de se méfier. Phineas pouvait bien inventer tout ce qu'il voulait au sujet de son monde, après tout, ce n'était pas comme si le No-maj avait à sa disposition le moindre élément qui puisse lui permettre de peser le pour et le contre dans l'affaire, ou de savoir plus précisément à quoi s'en tenir.

Certains termes lui échappaient ou avaient une consonnance encore un peu obscure dans son esprit malgré les explications de Phineas : obscurus, magizoologiste, Macusa... tout se mélangeait, mais le sens global semblait plus clair... Une force violente née d'une magie renfermée, refoulée, qui ne s'en était donc pas pris arbitrairement, ni aux fidèles de Salem, ni à son frère. En comprendre les raisons dans le cas des Barebone n'avait rien de véritablement difficile. Leur hostilité manifeste envers les sorciers avait forcément de quoi leur attirer tous les ennemis du monde de l'autre côté de la barrière (et Mary Lou Barebone en mériterait, à vrai dire, des deux côté). Dans le cas de son frère, c'était plus incompréhensible. Oh, pour avoir des ennemis, Henry en avait... il était loin d'être un enfant de choeur, et son engagement politique même n'avait même pas été du goût de son propre frère, c'est dire... Mais pourquoi ce sorcier s'en serait pris plus spécifiquement à lui ?

-Ce fardeau, je le porte déjà, n'est-ce pas ? Savoir et ne rien pouvoir dire et faire, c'est ce qu'il vivait depuis des semaines, des mois maintenant. Bon, il avait cherché à parler et à agir, mais au vu des résultats que ça avait donné, est-ce que ça comptait seulement ? Alors un peu plus, un peu moins... Je n'ai pas l'intention de m'en prendre à cette personne, quelles chances j'aurais, de toute manière ? Il marqua une pause, conscientisant pour la première fois un état de fait qui lui avait à lui-même échappé jusqu'ici. Je ne veux pas me venger. Je veux juste comprendre.

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angdon demeura un instant désarmé face à la réponse de son interlocuteur. C'était déstabilisant et en même temps évident. Credence avait été le plus malmené par Mary Lou, ça il l'avait bien compris. Il avait sans cesse semblé... fragile, craintif, comme un oiseau blessé. Il correspondait sans doute au profil d'un obscurial, avec tous les motifs compréhensibles qui l'auraient poussé à refouler sa magie. Sa disparition soudaine après la destruction de l'église trouvait une résolution évidente... Forcément, Langdon songea à Chastity et Modesty... devait-il leur en parler ? Non, ce serait sans doute pire si elles savaient. Etrangement, découvrir cette vérité ne l'envahissait pas de la colère sourde qu'il s'imaginait ressentir à l'égard de l'assassin de son frère. Il comprenait... ça l'horrifiait, mais il comprenait. Et il avait plus de pitié que de colère envers Credence... et finalement, s'il était quelqu'un à blâmer... Il devenait évident que c'était lui.

C'était lui qui avait présenté les Barebone à son père en présence de son frère. Il se souvenait du comportement de Henry envers Credence. Il l'avait traité comme un moins que rien, et le soir même, Henry mourrait sous ses yeux. Il était bel et bien ce qu'il avait redouté d'être. Il avait été l'intermédiaire entre son frère et son assassin. S'il n'avait pas été là, s'il ne s'était pas associé aux fidèles de Salem... alors son frère serait encore en vie.

-Je ne peux pas m'éloigner de cette famille, répondit Langdon. Il avait compris le sous-entendu, et il commençait à croire que son interlocuteur avait raison, que c'était à des personnes comme lui qu'il devrait s'associer pour rétablir une justice dont ce monde avait tant besoin, mais il ne pouvait pas couper les ponts avec les Barebone. Il ne se faisait plus d'illusions au sujet de Mary Lou, il en était arrivé au point où rien de ce qui la concernait ne pouvait réellement l'horrifier, en revanche, si elle était un danger, elle l'était au sein de son propre cercle également. J'ai promis à Chastity que je les aiderais, elle et sa soeur, et c'est ce que j'ai l'intention de faire. Je ne peux pas les abandonner.

Il ne refusait pas l'offre de son interlocuteur, mais il devait prioriser, à ses yeux c'était important. Sans cela, il ne serait pas digne de ses engagements.

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on, la famille Barebone n'était pas saine, c'était le moins que l'on puisse dire en effet, mais une seule personne en portait la responsabilité, et c'était Mary Lou. Ses enfants adoptifs, eux, n'avaient rien demandé à personne, et aux yeux de Langdon, il était naturel et nécessaire de leur venir en aide. Ils étaient des victimes, et ils n'avaient pas le demeurer... Oui, même Credence en avait été une. Langdon n'était pas certain qu'il serait capable de pardonner au Maledictus ce qu'il avait fait à son frère, quand bien même il l'avait fait sans être en pleine possession de ses moyens, et il ignorait ce qui se passerait s'ils devaient se retrouver face à face. Ce qu'il savait en revanche, c'est qu'au fond, Mary Lou était encore plus responsable de la mort d'Henry que ne l'était Credence (sans oublier que Langdon était à présent convaincu de porter sa propre part de culpabilité dans l'affaire, évidemment)... Et il était hors de question qu'elle s'en sorte à si bon compte. D'une manière ou d'une autre, il faudrait qu'elle paie.

Il hocha la tête quand Phineas lui demanda de garder le secret de ce qu'il apprendrait. Est-ce qu'il en serait vraiment capable ? Pas dit... Cela faisait des semaines et des semaines qu'il s'évertuait à faire comprendre à ceux qui l'entouraient que la sorcellerie existait bel et bien, et alors qu'il allait avoir plus d'informations et peut-être de preuves tangibles, il devrait se taire ? Et que faire de la mémoire de Henry, le monde n'avait-il pas le droit de savoir de quoi il était mort ? Au fond, Langdon était partagé... Il avait voulu apprendre la vérité à tous en pensant que c'était la seule manière pour les non-magiques comme lui de se protéger, mais à présent, il ne savait plus vraiment à quoi s'en tenir en ce qui concernait la magie elle-même. Rester sur ses gardes, oui bien sûr, mais... en fait, il n'en savait toujours pas assez pour savoir comment agir. En revanche, il était au moins sûr d'une chose bien précise, et c'était que tout n'était pas aussi manichéen qu'il ne l'avait cru, et qu'il devait agir avec plus de raison et de prudence qu'il n'en avait eu l'intention pour commencer.

-Je n'ai presque jamais quitté New York... et certainement pas le continent, répondit Langdon, intrigué. Pourquoi cette question ?

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n voyage, vraiment ? Langdon se sentait à la fois intrigué, et sur ses gardes. Curieux, il voulait réussir à apprivoiser un monde dont tous les codes lui échappaient encore, afin de parvenir à le comprendre et à le cerner. Mais... contradictoirement, il aurait tendance à se méfier de la confiance que son interlocuteur semblait lui accorder. Pourtant, ce n'est pas comme s'il avait fait un secret de son hostilité préalable à l'adresse de tout ce qui avait rapport avec la sorcellerie, et il pourrait très bien lui répondre dans l'intention seulement de le piéger.

Ce n'était pas le cas, ou du moins ça ne l'était plus, mais tout de même... pourquoi lui ? Il y avait sans doute multitude de non-magiques cent fois plus intelligents et ouverts d'esprit que lui qui auraient plus d'intérêt à se retrouver sous l'aile de Phineas. Et s'il avait d'autres projets à son adresse ? Est-ce qu'il n'était pas en train de se faire avoir ? Il avait envie de laisser le bénéfice du doute à son interlocuteur parce qu'il savait d'avance que, s'il refusait son offre, il allait le regretter. Mais ça, c'était plus facile à dire qu'à faire. La réponse était certainement oui, en fin de compte, mais ce ne fut pas la réponse que Langdon donna à son interlocuteur. Pas dans l'immédiat, en tout cas.

-Voyager où, exactement ? demanda-t-il. Je ne peux pas me permettre de m'absenter trop longtemps.

Ce n'est pas qu'il avait des obligations folles, à bien y regarder, loin de là, même. Langdon avait certes ses études, mais cela faisait plusieurs semaines qu'il ne mettait plus les pieds dans son école de journalisme, et le moins que l'on puisse dire, c'était qu'il n'éprouvait pas particulièrement de scrupules à ce sujet. Il n'avait pour ses études et ses futurs choix de carrière qu'un intérêt on ne peut plus limité à l'heure actuelle. Mais malgré tout, il ne voulait pas s'absenter trop longtemps. Déjà, son absence paraîtrait suspecte à Mrs Barebone, ensuite, il ne savait pas ce qui était susceptible d'arriver à ses filles quand il aurait le dos tourné. Aider Chastity et Modesty, c'était devenu son nouveau cheval de bataille, ce qui le libérait au moins un peu de son animosité envers la communauté sorcière, alors il ne pouvait pas y renoncer.

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