Comme chien et chat | Milla & Eric

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es derniers temps, tout semblait abonder dans le sens de Milla, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle n'avait pas la victoire modeste, elle était heureuse, d'excellente humeur, se sentait tout à fait capable de partir à la conquête du monde (même si elle ne voyait pas franchement ce qu'elle en ferait) et elle n'hésitait jamais un seul instant à le faire savoir, ce sans réellement de discrétion. Oui, c'est vrai, elle n'avait pas encore décidé d'un acheteur pour l'occamy, mais les enchères avaient fini par atteindre des sommes vertigineuses. Le moment venu, elle savait pertinemment qu'elle en tirerait un prix plus que confortable, et elle était assez impatiente... sans vouloir malgré tout précipiter les choses. Elle savait pertinemment que la patience attisait l'envie, et elle était convaincu qu'elle pouvait encore pousser le vice un peu plus loin. Dans tous les cas, elle avait toutes les cartes en mains, et elle n'envisagerait pas un seul instant de s'en plaindre. C'était d'ailleurs cela, sans doute, qui faisait aussi qu'elle ne se pressait pas. Ce sentiment de pouvoir n'était pas déplaisant, loin.

Et il était encore accentué par la tournure qu'avait prise sa relation avec Ethan. Elle l'avait travaillé au corps, celui-là (c'est le cas de le dire) mais au vu du résultat, elle ne regrettait absolument rien. Elle avait finalement réussi à l'attirer dans ses filets, et à présent que c'était chose faite, elle ne voulait surtout pas lâcher prise. Elle n'allait pas nier que ça avait été un jeu pour elle, tout d'abord, et que pervertir un homme non seulement fiancé mais engagé auprès du service de la justice magique du MACUSA avait de quoi l'émoustiller, mais elle considérait tout de même qu'ils étaient passés à un stade supérieur, et si elle était si fière de l'avoir, à présent (même si, techniquement, il ne lui appartemant pas), c'était parce que justement, elle l'aimait vraiment... beaucoup.

Bref, c'était d'humeur tout à fait radieuse qu'elle arpentait les rues de la ville, et elle se félicita d'être dans d'aussi bonnes dispositions quand son chemin croisa celui d'Eric Sangster... Autant dire que pour parler avec celui-là, il fallait clairement qu'elle ne soit pas au bout du rouleau. Là, elle était davantage d'humeur taquine, tout à fait dispo pour une petite joute verbale.

-Eh bien, qu'est-ce qu'il y a, Sangster, je te dérange dans ton petit repérage ? demanda-t-elle, malicieuse, avant de venir s'asseoir à côté de lui sans attendre son avis. S'il lui demandait d'aller ailleurs, forcément qu'elle allait rester. Alors, comment ça va ? Les affaires marchent bien ?

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e visage de Milla s'illumina d'un sourire satisfait quand son interlocuteur lui rétorqua qu'elle le dérangeait, point barre. Elle pourrait peut-être se vexer, ce n'était pas le cas. Leur animosité aussi certaine que réciproque avait toujours eu le mérite d'être parfaitement affichée. Entre eux, il n'y avait pas le moindre début de commencement d'hypocrisie. Alors quand ils avaient des choses à se dire, et surtout si elles devaient être déplaisantes, ils le faisaient sans hésiter un seul instant. Et c'était tout l'intérêt de leurs échanges. Si l'agacement que suscitait en elle Eric Sangster, elle devait bien reconnaître qu'elle ne prenait pas un complet déplaisir à leurs joutes verbales, ça avait le mérite d'être divertissant, et elle aimait l'idée de déplaire, surtout quand c'était de cette façon. Il était dérangé par sa présence ? Eh bien soit, elle allait d'autant plus s'imposer, dans ce cas. Pour le seul plaisir de l'encombrer et de tester son seuil de tolérance à sa présence.

Il ajouta qu'il n'avait certainement pas l'intention de parler affaires avec... elle, le toi prononcé sur un ton méprisant. Ben voyons, c'était toujours plus simple de discuter business avec ses autres poules ou maquereaux, hein ? Et il ajoutait tant qu'il y était que lui adresser la parole était déjà un immense effort de sa part. L'homme déployait définitivement des trésors de gentillesse pour lui faire comprendre combien elle était une gêneuse à ses yeux... Elle l'acceptait. Être méprisé d'un homme qu'elle méprisait tout autant, elle considérait que c'était... aussi naturel que rassurant.

-Je me sens incroyablement honorée, ironisa simplement Milla. Elles vont si mal, tes affaires, pour que tu ne veuilles même pas en parler avec moi ? Tes petites poules décérébrées ont fait l'acquisition d'un cerveau et ont enfin admis qu'elles y gagneraient à te fuir comme la peste ?

Puisqu'elle était là, elle avait bien l'intention de déblatérer à loisir, oui, et si elle pouvait au passage donner son opinion ô combien négative sur le petit business de Sangster, elle n'allait clairement pas s'en priver. Songer à nourrir ne serait-ce que le début de la moindre estime pour lui serait clairement un sacrilège à ses yeux. Et c'était beaucoup plus marrant de titiller son interlocuteur, de le chercher dans l'espoir de le voir finalement exploser. Même si, tout comme elle, il avait de l'endurance.

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illa se contenta d'afficher un sourire fier quand Eric loua son inventivité en levant les yeux au ciel. Bien sûr, elle savait pertinemment que sa remarque était ce qu'il y a de plus ironique, mais la jeune femme n'attendait clairement pas après l'opinion de son interlocuteur pour être fière ou non des saillies qu'elle lui adressait. Si quelque chose venant d'elle lui déplaisait, elle avait tendance à considérer que c'était bon signe. Quand il était question de son interlocuteur, de toute manière, l'esprit de contradiction de Milla avait très clairement tendance à être pour le moins exacerbé.

Eric affirma que ses "poules" allaient bien... Milla n'irait certainement pas le croire sur parole. Elle ne pouvait pas parler à la place de ces femmes, bien évidemment, mais Milla était du genre à penser qu'on ne pouvait pas être heureuse, épanouie ou quoi que ce soit de cet acabit quand on travaillait au service de cet homme sans scrupule. Certes, elle aussi n'en avait que très peu, des scrupules, mais au moins, elle ne marchandait pas des âmes humaines comme si elles lui appartenaient. Elle se contentait d'animaux. Et à ses yeux, ces bestioles n'avaient pas d'âme de toute façon, donc ça ne comptait pas véritablement.

Elle ne répliqua rien, de toute façon, son interlocuteur embrayait déjà, affirmant que son secteur commençait à être bouché... Spirituel. Comme si lui-même était le seul proxénète de la ville de de New York. Pour sa part, elle savait qu'elle avait de la concurrence, mais elle ne s'inquiétait pas franchement, surtout depuis qu'elle avait son occamy. Elle savait qu'avec le prix de revient de ses créatures, elle n'aurait pas à s'inquiéter pour son avenir pendant bien longtemps. Ce qui n'était pas le cas, ceci dit, elle ne s'inquiétait pas franchement pour son avenir. Bien au contraire, elle se sentait particulièrement confiante.

-Je me doute que tu serais aux premières loges pour profiter du spectacle, mais je ne me réjouirais pas trop vite, si j'étais toi. Les Aurors ont... tendance à avoir un faible pour moi.

Elle en parlait comme si tout ça était un jeu pour elle, et qu'elle menait la partie. Ce n'était pas le cas, pourtant. Il n'y avait eu qu'un Auror pour s'intéresser à son business, et c'est vrai qu'elle l'avait mis dans son lit. En revanche, ce n'était pas vrai qu'elle l'avait fait par pure stratégie, et qu'elle s'en foutait totalement.

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illa pourrait peut-être prendre ombrage des propos de son interlocuteur, mais pour cela, il faudrait certainement qu'elle ait bien moins d'amour propre et bien plus de considération pour les propos de son interlocuteur. Le fait est qu'ils étaient aux antipodes, tous les deux, au point qu'elle se plaisait à juger négatif tout ce qu'il considérait comme étant positif et réciproquement. Il ne servait à rien, de toute manière, de s'agacer du comportement et des remarques d'autrui. Il fallait être en phase avec soi-même et se moquer royalement de l'opinion des autres. Bien sûr, on était bien obligé, parfois, de compter après certaines opinions, mais Milla ne considérait pas que celle de son interlocuteur puisse mériter d'être entendue. Tout ça parce qu'il la qualifiait de "putain gratuite".

En l'occurrence, elle considérait qu'il s'agissait là d'une oxymore, si elle ne se laissait pas "dédommager", c'est bien qu'elle n'était pas une putain, et elle était bien libre de coucher avec qui elle voulait, sans restriction, et de dire non si elle le souhaitait, aussi. Est-ce que ça faisait d'elle une fille facile ? Hmm... Oui, certainement, elle ne pouvait pas spécialement le contredire, mais elle ne considérait pas réellement que ce soit une tare. Elle prenait ce qu'elle voulait, elle rejetait ce dont elle ne voulait pas, et elle ne s'en portait clairement pas plus mal.

Et puis bon, c'était Eric qui sautait directement à la conclusion qu'elle rendait la monnaie de leur pièce à ces Aurors présumément attirés par elle, elle, elle n'avait rien dit. Bon, en même temps, il n'y avait absolument rien à dire, puisqu'en vérité, elle n'avait qu'un Auror dans les pattes, et le fait est que c'était.... bref, c'était une tout autre histoire, et s'il lui venait parfois l'envie de s'épancher sur la question, ce n'était certainement pas en présence de son interlocuteur qu'elle allait se permettre un tel effort, il ne fallait pas déconner non plus.

-T'aimerais bien, hein ? dit-elle simplement, absolument pas inquiète. Forcément, elle n'était pas à l'abri de la Justice, elle qui passait sa vie à ne pas la respecter, mais elle avait conscience, elle ne s'imaginait pas une seule seconde finir derrière les barreaux, et elle ferait ce qu'il faudrait pour que la situation demeure ainsi. Tu sais, pour juger de ma qualité, il faudrait que je t'en ai laissé l'opportunité. Elle afficha un sourire. Peut-être que tu es frustré de ne pas savoir ce que je vaux au pieux, en fin de compte.

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illa était bien loin de prendre ombrage des propos de son interlocuteur alors que ce dernier affirmait qu'elle n'était pas du tout son genre. Pour tout dire, elle se félicitait de ne pas être le genre de quelqu'un comme lui, elle n'avait aucune envie de cocher les cases qui feraient d'elle la femme idéale à ses yeux. Elle préférait largement son mépris à son affection, c'était tout de même bien plus amusant... Et ça n'oubliait clairement pas d'être réciproque. Bon, Milla ferait preuve d'une malhonnêteté manifeste si elle affirmait qu'elle trouvait qu'il n'y avait rien à sauver du tout chez Eric Sangster, elle pouvait quand même reconnaître qu'il était plutôt bel homme, mais il lui était bien trop antipathique sur de trop nombreux aspects pour qu'elle puisse évoquer l'éventualité du moindre coït entre eux sans que ce soit teinté d'ironie et d'un soupçon de dégoût, tant qu'à faire. Alors non, elle ne se vexerait certainement pas.

Bon, quand il lui assura qu'elle était plutôt le genre de fille à bosser pour lui, elle se sentit légèrement piquée. Ce n'est jamais agréable de se faire traiter de putain, même en sous-texte, on ne va pas se le cacher, mais en même temps, elle se disait qu'elle ne devait accorder qu'un minimum de crédit à ces affirmations. Déjà, Milla était convaincue qu'Eric n'hésitait pas à se servir parmi le lot de ses prostituées, même si elle fondait cette possibilité sur du vide, globalement, ensuite, même si elle les avait elle-même qualifiées de poules décérébrées, elle pouvait au moins admettre que ces filles suscitaient le désir, et sans vouloir être réduite à cette seule "qualité", elle l'acceptait tout de même.

-Quel dommage que je sois beaucoup trop chère pour toi, répliqua-t-elle dans un fin sourire.

Trop chère pour tout le monde, car son corps n'était pas - et ne serait jamais - à vendre. Bon, on pourrait dire que c'était stupide, puisque quand elle s'offrait, c'était gratuitement, mais tout du moins sa dignité demeurait-elle intacte. Bon, la dignité, c'était aussi une question de perspective, mais elle le pensait en tout cas.

-Toi tu serais presque mon genre... enfin, si tu ne cumulais pas à toi seul presque tous les défauts du monde.

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illa pourrait sans doute se vexer si elle espérait bel et bien plaire à son interlocuteur, mais à la vérité, elle s’en moquait un peu. Non, en fait, elle s’en moquait complètement, c’est rien de le dire. Si elle aimait être attirante au regard des hommes, si elle aimait attirer l’attention, et plus encore de ceux qui, à l’origine, ne devraient pas le moins du monde être intéressés, elle n’avait vraiment aucune intention de faire en sorte qu’Eric lui trouve un quelconque intérêt. Certes, la jeune femme trouvait que son interlocuteur était un homme beau physiquement, mais elle n’allait certainement pas lui courir après pour la peine. Pour cause, tout, dans son attitude, absolument tout, l’incommodait au plus haut point. Il était une source d’agacement considérable et perpétuelle chez elle.

Et ce n’était certainement pas cette conversation qui allait y changer quoi que ce soit, bien au contraire. Cela ne faisait que la conforter dans le fait qu’ils ne pourraient jamais s’entendre, mais d’un autre côté, elle aimait bien leurs conversations, elle aimait bien la façon qu’ils avaient de se détester. Et elle avait bien envie que ça continue. Elle devait bien admettre que ça amusait presque Milla d’entendre des remarques qui devraient passer pour des insultes, comme si c’était le plus grand privilège du monde que de se faire payer à prix d’or la valeur de sa chair et de son intimité. La jeune femme n’avait aucun problème avec le fait d’être, disons, gratuite, même si elle était convaincue que certains seraient capables de dépenser une somme inestimable pour ses beaux yeux (on a de l’orgueil ou on en a pas. Au moins, il admettait qu’elle n’était pas repoussante, mais apparemment, son attitude serait un problème. Soit, mais elle n’avait pas le sentiment que l’on demandait vraiment à ses « gagneuses » de faire autre cohose que de montrer leur corps à défaut de leur caractère. Cela signifiait, ceci dit, qu’il fallait avoir un caractère à vendre son corps, et là-dessus, c’était sans doute sûr que ça pècherait.

-Tu ne pourrais pas me faire de plus beau compliment, répondit-elle avec le sourire. Le jour où je disposerai d’un caractère à même de te convenir, le dégoût que j’aurais de moi-même serait… incommensurable. Elle marqua une légère pause. Mais toi comme moi, on est bien placés pour savoir que n’importe quelle vie est susceptible de se monnayer, alors même si je prendrais l’inverse pour un compliment, je doute fort de faire exception.

   
   

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illa accueillit les propos de son interlocuteur avec le sourire. C'est sûr, avec Eric, il ne fallait pas être susceptible, surtout quand on était dans son collimateur. Il ne mâchait pas ses mots et ne cherchait clairement pas à ménager sa sensibilité. D'un autre côté, pour que cela soit possible, il faudrait qu'elle ait vraiment une sensibilité à ménager, et c'était loin d'être son cas. Comme on dit, la bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe. Sauf que Milla n'avait rien d'une blanche colombe, mais passons.

Elle était quoi qu'il en soit bien trop orgueilleuse et sûre d'elle pour prendre ombrage des paroles de son interlocuteur. Pour elle, c'était un jeu. Ce n'est pas qu'elle aimait particulièrement se laisser insulter non plus, il ne s'agirait pas d'exagérer, mais elle aimait en revanche l'idée que ces remarques déplaisantes soient la marque du profond agacement de son interlocuteur. Clairement, il ne pouvait pas l'encadrer, et il s'évertuait à le lui faire comprendre de toutes les manières possibles. Et plus il insistait, plus elle avait envie de l'agacer encore davantage. C'était un jeu, c'était innocent, ça passait le temps... comment pourrait-elle passer à côté.

Alors oui, ça lui était bien égal qu'il estime qu'elle appartenait au fond du fond du panier, puisque clairement, elle n'avait pas la moindre envie de se fonder sur ses appréciations pour déterminer quel genre de personne elle était. Elle était parfaitement en phase avec elle-même, elle aimait qui elle était et ne laissait pas sa confiance en soi être ébranlée par le premier venu. En plus, Eric n'était pas le premier venu, il était... un partenaire divertissant de conversation qui en retour ne la trouvait pas divertissante du tout. Et c'était en partie ce qui rendait la chose divertissant. Un cercle vertueux, donc. Ou plutôt vicieux, selon les points de vue. Être une emmerdeuse et une empêcheuse de tourner en rond, c'étaient là des titres qu'elle appréciait et endossait avec un immense plaisir, à vrai dire.

-Et ça m'est totalement égal, ça n'a pas changé non plus, répondit Milla avec le sourire. Je ne te parle pas dans l'espoir incommensurable d'obtenir ton approbation, tu sais. Je te parle uniquement parce que ça te fait chier.

Comme ça, c'était clair. A partir de là, pas étonnant qu'Eric la considère comme une emmerdeuse. Mais après tout, hein...
   

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illa, une fois encore, ne se sentait pas particulièrement blessée par les propos de son interlocuteur. Et pour cause, pour qu'elle en prenne sincèrement ombrage et daigne se vexer, il faudrait qu'elle trouve un fond de vérité à ses propos. Et elle estimait qu'il n'y en avait aucun. Oui, quand elle avait l'occasion de l'emmerder, elle était tout simplement ravie, mais ce n'est pas pour autant qu'elle occupait tout son temps à cela. Et pour cause, ce n'était pas comme si elle venait lui trainer dans les pattes à longueur de temps, loin de là. En l'occurrence, elle avait croisé sa route, et donc elle n'avait pas résisté à l'envie de venir l'emmerder, mais ce d'autant plus que cela faisait vraiment un long moment qu'ils ne s'étaient pas revus tous les deux. Elle haussa donc les épaules.

-Tes mots sont incroyablement blessants, tu sais, mon pauvre coeur de femme faible et fragile est incapable de le supporter, plaisanta-t-elle avec ironie.

Evidemment, elle était loin de penser un seul des mots qu'elle venait de prononcer. Elle se contentait d'exposer ce qui à ses yeux devait être la vision que le proxénète devait avoir des femmes. Peut-être qu'elle se trompait totalement lourdement, mais quand on commercialisait le corps des femmes, quand on exploitait leurs faiblesses comme elle estimait qu'il le faisait avec les prostituées de son petit harem, on devait forcément considérer les femmes comme inutiles et sujettes à moqueries. Enfin, peu importantes.

-Je ne m'étais absolument pas rendu compte que je n'avais absolument aucune autre occupation à part celle de te traîner dans les pattes et de venir t'emmerder, je ne me rendais pas compte que je cessais d'exister quand tu n'étais pas dans les parages, ajouta-t-elle ensuite, toujours sur le même ton parfaitement humoristique. A moins que tout ça soit dans ta tête, ajouta-t-elle alors dans un haussement d'épaules. Tu penses peut-être un peu trop à moi, qui sait. Je ne pourrais pas te le reprocher, en même temps, je ferais pareil, si j'étais toi.

La jeune femme savait bien que ce n'était pas du tout le cas, mais le but de la manoeuvre n'était absolument pas de dire des choses justes mais simplement de dire des choses agaçantes. Et elle savait que personne n'était mieux capable d'agacer Eric qu'elle-même.
   

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on, pour autant qu'elle aimait bien se prendre le chou avec Eric et que c'était même susceptible de faire sa journée, elle devait bien reconnaître qu'ils commençaient à gentiment tourner en rond. C'était un peu inévitable avec des personnalités comme les leurs, il faut dire. Ils avaient depuis longtemps fait le tour de la question : ils ne se supportaient pas, ils étaient incompatibles, chacun n'aimait pas les manières de l'autre, et ils avaient sans doute épuisé les façons de se le dire... quoi que c'était bon de réutiliser les mêmes recettes quelquefois... Ceci dit, elle commençait malgré tout à s'en lasser. A s'en lasser très largement, même.

-On fait ce qu'on peut, que veux-tu, répondit Milla dans un sourire.

Elle pourrait bien le contredire, mais dans le fond, elle n'avait pas besoin de connaître l'appréciation d'Eric sur sa vie. Elle en était tout à fait satisfaite, elle savait qu'elle était intéressante, pas besoin d'entendre son interlocuteur le confirmer... d'ailleurs, il était très probable qu'il soit à même d'admettre, en son fort intérieur, que sa vie n'était pas si morose que cela. Tout comme Milla se doutait qu'Eric devait avoir une vie mouvementée, elle considérait seulement que ses choix de vie étaient absolument déplorables, mais ça c'était encore une autre affaire, bien sûr.

-Merci d'avoir éclairé de ta présence ma vie ô combien misérable, ajouta-t-elle. Elle avait bien envie de rester plus longtemps, juste pour l'emmerder, mais elle-même commençait à se lasser de leur petit jeu. Surtout, elle était à court d'arguments susceptibles d'y ajouter plus de piment. Alors autant ne pas forcer les choses. Elle avait forcément mieux à faire dans tous les cas. Il est temps pour moi de retourner à mon quotidien triste et morose, ajouta-t-elle d'un ton amusé. Encore merci pour le divertissement, te salueras tes petites exploitées de la part.

Ce n'était que partie remise. Ils finiraient bien par se revoir, et à se balancer de nouvelles remarques plus ou moins élégantes mais tout du moins toujours négatives à un moment ou à un autre. Ils gravitaient dans les mêmes milieux, qu'ils le veuillent ou non (et ils ne le voulaient jamais vraiment), il n'était pas rare qu'ils se retrouvent dans le sillage l'un de l'autre. C'était comme ça.


   

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