Il existe deux sortes de cécité sur cette terre : les aveugles de la vue et les aveugles de la vie | Mary Lou & Henry

C

e qu'il y avait de plus alarmant, au fond, concernant Mary Lou, c'est que contrairement à ce que son interlocuteur pensait, elle croyait exactement en ce qu'elle disait. Elle n'utilisait pas son discours dans l'espoir d'endormir les masses et d'en obtenir le meilleur profit (dans ce cas, il faudrait qu'elle change son fusil d'épaule et élabore une autre sorte de mensonge car, de toute évidence, celui-ci, si tant est qu'on considère qu'il en soit un, ne faisait définitivement pas mouche), elle le faisait avec l'intention de prévenir un danger qui se profilait à grand pas, de plus en plus visible, de plus en pluus tangible. Oui, elle pensait sincèrement être altruiste... C'était ça, le pire.

Bon, Henry Shaw avait tout de même raison sur un point : oui, elle avait espéré obtenir un financement de sa part... Enfin, elle avait bien compris qu'elle pouvait s'asseoir dessus. Pour que le patron de presse daigne ouvrir les yeux sur ce qui était pourtant la pure et simple vérité, il faudrait qu'il ait un électrochoc d'un autre ordre... ce qui semblait quasiment impossible tant l'homme était fermé et obtus... à un point... Au point que la mort de son propre fils ne lui ait pas suffi. Peut-être faudrait-il attendre celle de Langdon pour qu'il réagisse enfin. Ce ne serait pas forcément une mauvaise chose. S'il continuait sur sa lancée, Langdon, en dépit de sa bonnne volonté, lui serait définitivement plus utile mort que vivant, c'était un fait.

-Nous serons au moins d'accord sur un point, répondit posément Mary Lou. Elle détestait être insultée, elle sentait la colère agiter la moindre fibre de son être, mais elle restait malgré tout très calme. Quand sa colère explosait, personne n'avait envie de se retrouver dans son sillage, définitivement pas, et ses enfants en avaient fait les frais plus d'une fois. Mais face à Henry Shaw, elle n'avait pas l'intention de hausser le ton, même si son attitude suscitait en elle le plus souverain des mépris. Nous perdons tous les deux notre temps, et le mien est précieux.

Le patron de Shaw News estimerait certainement que son temps l'était davantage, parce qu'il étaà la tête d'un empire médiatique et financier, mais Mary Lou considérait que sa propre mission était bien plus importante. Ceci dit, son opinion ne comptait plus.

-Je vous souhaite une très bonne journée, monsieur Shaw.
   

   

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